En avant !

Rochiel avait conduit Kaiji vers un endroit qui s'avérait être une vaste plaine. C'était un endroit vraiment très étendu et il n'y avait strictement rien hormis de l'herbe. De l'herbe à perte de vue. Et seulement ça. Le souvenir du remerciement de son maître contractait son estomac. Qu'est-ce qu'il y avait dans cette simple phrase qui pouvait le chambouler à ce point ?

*Arrêtes, tu t'égares... Tu ferais mieux de regarder où tu mets les pieds...*

A peine cette réflection faite que le brun se prit les pieds dans une petite motte d'herbe. Il perdit l'équilibre et il s'étala lamentablement au sol, soulevant au passage un petit nuage de poussière. L'esclave se remit sur ses pieds aussitôt et lança un sourire désolé et un peu stupide au blond pour qu'il ne s'inquiète pas.

"Je vais bien, c'est rien..."

Le brun se hâta de rejoindre son maître et tenta de ne plus penser à cette toute petite phrase qui lui faisait tourner la tête.

"Qu'est-ce qu'il y a au-delà de ces plaines ?" demanda-t-il, se demandant ce qui pouvait bien les attendre.

Kaiji avait l'air songeur et Rochiel n'osa pas interrompre ses pensées. Ils se dirigèrent vers les plaines de Morar : à perte de vue, il n'y avait que de l'herbe. Or, pour avoir entendu les voyageurs de Sket leur raconter leurs mésaventures, Rochiel savait bien qu'une multitude de bestioles étranges se cachaient entre les herbes, et que celles-ci étaient tous sauf tranquilles...
Elles étaient également dangereuses, à en juger par le vol plané qu'effectua soudain Kaiji, bien malgré lui! Rochiel le vit s'étaler au sol, et se remettre aussitôt debout en s'excusant.

"Je vais bien, c'est rien..."

Sur le coup, Rochiel essaya de se retenir mais il ne réussit pas à se contenir assez longtemps et il explosa soudain de rire, se tenant les côtes, parti dans un fou rire mémorable. La façon dont Kaiji était tombé était drôle, certes, mais le meilleur, c'était incontestablement son sourire gêné et timide qu'il avait eut en se relevant.
Il fallut quelques minutes à Rochiel pour se calmer et il essuya les larmes qui avaient perlé à ses yeux.
Il se savait impoli avec Kaiji, mais c'était trop bon et il n'avait pas ri comme ça depuis longtemps.

" Hein, quoi? Qu'est-ce qu'il y a derrière ces plaines, c'est ça? " demanda-t-il, le souffle court. " Et bien, il y a normalement la ville de Naya... Mais on devrait croiser des montagnes bien avant... Pourquoi? "

Il posa sa main sur l'épaule de Kaiji, oubliant momentanément tout, et lui sourit:

" Ne t'inquiéte pas, je te protégerai, n'aies aucune crainte! "

Kaiji aurait pu se sentir vexé de la réaction de son maître mais cela liu faisait plaisir de le voir rire ainsi. Il avait l'air si joyeux que cela lui faisait un bien fou, comme si cela lui otait un poids des épaules. Il rit doucement puis franchement, le rire de Rochiel étant communicatif.

" Hein, quoi? Qu'est-ce qu'il y a derrière ces plaines, c'est ça? Et bien, il y a normalement la ville de Naya... Mais on devrait croiser des montagnes bien avant... Pourquoi? "

"Pour savoir... Je n'ai jamais rien vu de ma vie, ni jamais entendu de belles histoires de voyages alors, je voulais savoir un peu quelle serait notre route..."

Cette fois, lorsque le blond posa sa main sur son épaule, l'esclave ne put réprimer un sursaut. Il ne s'attendait pas à cela mais il ne repoussa pas la main de son maître.

" Ne t'inquiéte pas, je te protégerai, n'aies aucune crainte! "

Kaiji prit la main de Rochiel dans la sienne et y déposa ses lèvres. Il aurait aimé sentir à nouveau cette étreinte apaisante autour de lui. Le brun se contenta de détourner les yeux, le coeur battant pour une raison qu'il ignorait. Il appuya simplement son front contre l'épaule du blond, cherchant à se défaire des souvenirs sordides de la veille. Puis l'esclave leva vers lui un visage souriant.

"Pardon. Je fais souvent des choses stupides. On continue ?"

Le sursaut qu'eut Kaiji n'échappa pas à Rochiel et ce dernier eut un petit soupir : il sentait à chaque fois son coeur se serrer un peu plus au fur et à mesure qu'il constatait les dégâts subis par Kaiji, à cause de ce porc de Kyo... Mon dieu ce qu'il s'en voulait de l'avoir entraîné là-bas. Il n'aurait jamais dû..
Mais à sa grande surprise, l'esclave lui prit sa main et la baisa trés délicatement, dans un geste si innocent et pourtant si empli de tendresse que Rochiel se sentit rougir... Kaiji était si... beau. A cet instant, les yeux de Rochiel n'arrivaient pas à s'en détacher, comme hypnotisés. L'esclave connaissait-il son pouvoir attractif?
Rochiel chercha son regard pour essayer de comprendre ce qui se passait, mais les yeux de Kaiji le fuyaient systématiquement, ce qui attrista Rochiel, sans même qu'il comprenne les sentiments qui se bousculaient en lui.
Puis Kaiji appuya doucement son front contre l'épaule de son maître, et ce dernier en apprécia le contact : quelque part au fond de lui, il mourrait d'envie de prendre le jeune homme dans ses bras, mais il faisait tout pour se contenir, et en appréciait doublement le simple contact contre son épaule en compensation.
Mais le sourire que Kaiji lui adressa pour se donner contenance n'eut aucun effet sur Rochiel, à part celui de lui faire encore plus mal au coeur... Kaiji avait l'air si mal, si perdu... Et lui-même n'était pas fichu de trouver un moyen de l'aider!!

"Pardon. Je fais souvent des choses stupides. On continue ?"

Que pouvait-il dire? Qu'il était un sombre crétin et mourrait d'envie de le prendre dans ses bras, mais qu'il craignait sa réaction et son rejet probable...?
Rochiel se contenta de baisser les yeux et de dire d'une voix faible:

" Oui, bien sûr, on continue... "

Il avait si mal pour Kaiji... Si seulement il était arrivé à temps dans ces toilettes, s'il avait arrêté Kyo, s'il... S'il avait été là, tout simplement. Il lui avait promis de le défendre et il avait laissé cela se produire...
Ne pouvant plus se retenir, il tendit sa main et la posa doucement sur la joue de Kaiji, la caressant tendrement sans aller trop loin.

" Ne t'excuse pas, s'il te plaît... Ce serait plutôt à moi de le faire... Maintenant que nous sommes tous les deux, tu pourras faire ce que tu veux, je ne trouverais jamais cela stupide, je te le promet. "

Puis, fort de cette promesse, il s'avança entre les herbes hautes des plaines de Morar en lançant un petit regard attendri à Kaiji.

" Surtout reste prés de moi, on ne sait jamais... "

" Ne t'excuse pas, s'il te plaît... Ce serait plutôt à moi de le faire... Maintenant que nous sommes tous les deux, tu pourras faire ce que tu veux, je ne trouverais jamais cela stupide, je te le promet. "

Kaiji était tellement surpris qu'il en était presque figé sur place. Ses yeux sombres s'étaient aggrandis de stupeur. A cet instant précis, il aurait voulu se jeter dans les bras de Rochiel. Tout ce qui lui avait toujours été refusé, il le lui offrait sur un plateau d'argent. L'esclave se mordit la lèvre inférieure, priant le ciel de tous ses voeux pour ne pas fondre en larmes.

"Merci... Merci infiniment..."

Puis le blond continua d'avancer.

" Surtout reste prés de moi, on ne sait jamais... "

En temps normal, le regard de Rochiel lui aurait donné envie d'aller lui compter fleurette, mais Kaiji n'arrivait plus à remettre ce masque qu'il avait involontairement abandonné la veille, lors de leurs achats. Le brun se contenta donc de hocher la tête et il rattrapa son maître, suivant son allure et évitant à tout prix de se prendre les pieds dans une nouvelle motte d'herbe. Il allait ouvrir la bouche lorsque un mouvement étrange dans les hautes herbes attira son attention. L'esclave porta la main à son épée, les sens en éveil. Les herbes bougèrent vivement sur leur gauche et Kaiji se rapprocha de Rochiel. Un grognement sourd s'éleva de l'endroit où l'herbe avait bougé.

"Maître ? Que fait-on ?"

Le blond n'eut pas l'occasion de lui répondre car un énorme fauve bondit sur eux, toutes griffes dehors. Le brun eut juste le temps de pousser son maître puis de s'écarter du passage du félin. Kaiji sortit sa lame et ne jouant pas les imprudents, attendit que la bête charge à nouveau. Sauf qu'au lieu de le charger lui, il se jeta sur son maître, la gueule écumante et surtout pleine de crocs acérés.

[Ooouuuuuh !!! En avant ! Smiley_5

Je trouve ton post vraiment adorableuh !]

Rochiel avait senti l'émotion chez Kaiji et il avait préféré avancer, faisant semblant de ne rien remarquer. Sa voix avait même trembler lorsqu'il l'avait remercié, et cela avait ému Rochiel plus que de raison.
Kaiji le suivit sans problème et ils marchèrent ainsi pendant un petit moment. Se retournant parfois, Rochiel voyait la ville de Suden disparaître auloin et cela lui donnait une drôle d'impression. Celle d'être à la fois un homme, puisqu'il était maintenant indépendant, et à la fois un enfant, puisqu'il se retrouvait seul au milieu du vaste monde...
Perdu dans ses réflexions, ce fut la petite phrase angoissée de Kaiji qui l'en sortit brutalement:

"Maître ? Que fait-on ?"

Etonné, Rochiel tourna la tête evrs son esclave: ce dernier avait sa main sur son arme et guettait les hautes herbes avec inquiétude. Qu'est-ce qui se passait? Avait-il été assez stupide pour ne rien remarquer?
Il allait chercher la cause de l'angoisse de Kaiji, quand un fauve bondit soudainement et Rochiel sentit qu'on le poussait au sol pour éviter l'attaque rapide et dangereuse du fauve. Il atterit au sol lourdement, et mit un certain temps avant de réaliser qu'il n'avait pas préparé son arme pour l'attaque. Se redressant rapidement, empêtré dans ses vêtements et avec son sac qui s'était éparpillé au sol dans sa chute, il chercha hâtivement son poignard, le souffle court et les yeux fous.
Trés inquiet, il finit par retrouver son petit poignard et s'en saisit. Puis il tourna ses yeux vers Kaiji, inquiet de savoir s'il allait bien. Il eut à peine le temps de croiser son regard paniqué qu'il sentit un poids se jeter sur lui et lui couper le souffle sur le coup. Il voulut se dégager et donna un coup dans la masse lourde qui s'était abattue sur lui, mais la bête attrapa son bras entre ses crocs et le mordit profondément.
Rochiel poussa un cri de douleur mais son esprit réussit à rester clair malgré la souffrance. Il fallait qu'il agisse avant que le fauve ne réattaque.
Son poignard dans sa main libre, il frappa de toutes ses forces dans la fourrure chaude. Le sang jaillit immédiatement pendant que le fauve poussait un cri étrange, un feulement de douleur. Rochiel sentit la masse se tordre au-dessus de lui pour échapper à la morsure du poignard mais il continua de frapper au hasard. La bête s'appuyait maintenant de tout son poids sur lui et Rochiel crut qu'il allait étouffer.

" Kaiji!!! " parvint-il à hurler. " Ton épée!"

C'était le seul moyen pour tuer net la bête avant qu'elle ne fasse plus de dégâts...

A peine la bête s'était-elle jetée sur son maître que celui-ci poussait un cri de douleur. Kaiji ne savait pas comment s'y prendre. Il s'était déjà battu contre les hommes: ils étaient retords et il fallait s'attendre à tout avec eux. Par contre, il n'avait jamais eu affaire à un animal. Et c'était bien ce qui le dérangeait: les animaux étaient imprévisibles et il ne savait pas comment aider son maître.

" Kaiji!!! Ton épée!"

La voix de Rochiel lui était parvenue malgré les grognements du fauve. Et surtout cet appel le sortit de ses pensées. Il n'y avait pas à réfléchir: il devait simplement agir comme un animal et l'instinct de survie primait sur tout le reste. Dans l'esprit de l'esclave tout devint clair alors qu'il s'élançait contre la bête: il devait tout simplement penser comme une renarde qui protège ses petits et agir en conséquence.

Il leva son épée, cadeau de Rochiel, au dessus de sa tête et la planta à la verticale dans le corps de l'animal qui se tordit sous le coup. Pourtant, le fauve n'était pas mort et il gronda comme s'il n'avait pas dit son dernier mot. Kaiji frappa à nouveau, enfonçant presque la lame jusqu'à la garde, et donna des coups jusqu'à ce que l'animal s'effondre sur son maître, sans vie. L'esclave poussa le cadavre du fauve sur le côté pour dégager le blond et il se jeta à genoux près de lui.

"Maître !!"

Rochiel était couvert de sang. Sûrement en grand partie celui de la bête mais il l'avait entendu crier. Il retira sa veste et essuya son maître avec. Le brun était naturellement pâle mais cette fois, avec la peur, il était presque cadavérique et le blond arborait un teint pratiquement similaire.

"Maître ! Où êtes-vous blessé ?!" demanda-t-il d'une voix blanche, ne trouvant pas la blessure avec tout ce sang.

La bête se démenait au-dessus de Rochiel et ce dernier avait du mal à contenir ses assauts devenus trés violents. Il espérait de tout coeur que Kaiji agirait vite mais il ne pouvait qu'attendre.
Il sentit soudain la bête se tordre au-dessus de lui et un flot chaud coula sur lui : du sang!! Il essaya de se dégager pour échapper au fauve mais la bête était toujours vivante et l'en empêchait, son poids retenant prisonnier Rochiel.
Un second coup ébranla la masse chaude du fauve et Rochiel sentit soudain la tension qui habitait le corps au-dessus de lui diminuer jusqu'à disparaître... Le fauve était en train de mourir...
A bout de force, Rochiel essaya de se dégager mais en vain, et il eut littéralement le souffle coupé quand il sentit le poids de la bête l'écraser alors qu'elle s'effondrait sur lui.
Heureusement, Kaiji vint à son secours et l'aida à déplacer le poids énorme du fauve loin de lui. Il reprit de l'air dans ses poumons à grandes goulées, la gorge rauque et les yeux écarquillés sur le choc de ce qui venait de se passer.

"Maître !!"

La voix lui parvint difficilement et il tourna la tête dans sa direction, le regard hagard et perdu. Il avait encore l'impression de sentir le poids du fauve sur lui et avait du mal à accepter que tout cela était bel et bien fini...
Ses yeux croisèrent ceux de Kaiji... Il était si pâle et si effrayé que l'espace d'un instant, Rochiel se demanda s'il n'était pas mort... Mais l'air qui passait dans ses poumons attestait du contraire et il cligna plusieurs fois des yeux pour essayer de reprendre pied avec la réalité.
Il sentit vaguement le brun l'essuyer avec sa veste, essayant d'enlever le sang dont il était recouvert...

"Maître ! Où êtes-vous blessé ?!"

La voix de Kaiji ramena Rochiel à la raison et il secoua la tête pour chasser le cauchemar qui venait d'avoir lieu. Il tourna la tête pour voir le corps du fauve reposant non loin d'eux et il se maudit intérieurement, se traitant de tous les noms. Comment avait-il fait pour ne pas l'entendre venir? Etait-il si débile que cela?
Et s'il avait blessé Kaiji...?
Affolé soudain, il se redressa, ignorant les appels douloureux de son bras blessé, et regarda attentivement Kaiji, avant de lever sa main sur la joue du jeune homme et de le caresser doucement...

" Tu n'es pas blessé...? " demanda-t-il faiblement, inquiet.

Il remarqua soudain que sa main était tâchée de sang et salissait la joue si pâle de Kaiji. Il la retira immédiatement, s'excusant.

" Pardon... Je suis désolé... Je... J'aurai dû le voir venir... "

Il se sentait si misérable et anéanti... Il déglutit difficilement, avant de grimacer douloureusement. Il jeta un regard sur son bras et constata avec horreur qu'il était drôlement amoché. Les crocs du fauve ne l'avaient pas épargné...

" Je... Mon bras... " articula-t-il en pâlissant, se rendant compte soudain de la situation.

Kaiji n'en menait pas large et le fait que son maître ne réagisse pas vraiment lui faisait peur. Et si la bête l'avait grièvement blessé ? Et si... Le brun préféra ne pas penser à la suite. A ce moment-là, Rochiel se redressa, encore livide.

" Tu n'es pas blessé...? "

"Je vais bien, maître..."

L'esclave aurait voulu poser sa main sur celle du blond mais celui-ci la retira aussitôt.

" Pardon... Je suis désolé... Je... J'aurai dû le voir venir... "

"Ce n'est rien ! Tant que vous êtes en vie..."

Le visage de son maître se tordit en une grimace de douleur. L'inquiétude de Kaiji qui s'était mise en sourdine s'empara de nouveau de son coeur avec force. Rochiel fixa son bras: il était enfin renseigné sur l'endroit où se trouvait sa blessure.

" Je... Mon bras... "

Avec effarement, le brun vit son maître pâlir. Kaiji chercha des yeux son sac qu'il avait lâché dans le feu de l'action. Lorsqu'il y avait posé une petite pile de vêtements le matin même, il y avait vu en plus des petits paquets de vivres une sorte de petite trousse et des bandages. A contre-coeur, il se leva.

"Je vais vous soigner, ne vous en faites pas !"

Sur ces mots, le brun s'éloigna de quelques pas dans les herbes hautes à la recherche de ce maudit sac dont il avait tant besoin. Il l'aperçut non loin de lui et il courut le ramasser. Lorsque l'esclave se retourna pour rejoindre son maître son coeur manqua un battement: dans les herbes hautes, comment pourrait-il retrouver son chemin ? Cependant, il fut vite rassuré car des gerbes de sang avaient tâché un endroit bien précis de la plaine et Kaiji n'eut aucun mal à revenir sur ses pas. Il s'agenouilla près de Rochiel et commença à défaire son paquetage: il devait trouver cette fichue trousse.

Il jeta un coup d'oeil à son maître qui était plus que pâle et malgré le soleil qui dardait ses rayons sur eux, le teint du blond était préoccupant. Après avoir retiré ses vêtements du sac, il fouilla un peu plus facilement mais ne trouva rien dans le fond du sac. La panique l'étreignait toujours plus à chaque seconde qui passait et sans le vouloir, des larmes roulaient sur ses joues. A bout de nerfs et après avoir retourner sept fois minutieusement son sac mais sans succès, le brun renversa entièrement son contenu sur le sol. Les vivres s'y entassèrent dans un peu bruit mat et par ce qu'il qualifia de miracle, la trousse et les bandages aussi, à moitié coincés dans les paquets de nourriture.

"Enfin !"

Kaiji soupira de soulagement et se dépêcha d'aller soigner son maître. Il retira précautionneusement sa chemise et essuya le sang qui recouvrait son bras. Ensuite il examina la plaie: le fauve ne s'était pas montré doux avec lui et les traces des crocs étaient profondes. Son bras lui semblait aussi un peu gonflé et un peu bleu comme s'il était fracturé ou quelque chose comme ça. Le brun fouilla dans la petite trousse et y prit un petit bout de tissu et un petit flacon qu'il imbiba du liquide qu'il contenait et l'apliqua sur la blessure.

Kaiji réagit rapidement avec une dextérité surprenante. Il se releva tout en disant:

"Je vais vous soigner, ne vous en faites pas !"

Rochiel le regarda partir, un peu surpris, se demandant surtout où il se rendait, avant que son bras ne lui rappelle la douloureuse situation qu'il vivait. Il lança un regard noir au corps du fauve non loin de lui, recouvert comme lui de son sang. La bête était énorme et Rochiel se maudit une nouvelle fois de ne pas l'avoir remarqué plus tôt!
S'il avait fait attention au lieu d'être dans la lune, perdu dans ses pensées stupides, tout cela ne serait pas arrivé : il n'aurait pas été blessé et il aurait tué le fauve de ses flèches bien avant qu'il ne soit sur eux...
Dire qu'il se glorifiait de se sentir adulte, et voilà qu'à peine son voyage commencé, il était déjà blessé! Et de la manière la plus stupide qui soit en plus!
Furieux contre lui-même, il donna un coup dans les herbes, exprimant toute sa rage intérieure.

" Abruti!! " se dit-il à lui-même.

Mais le coup secoua son corps, touchant par là-même son bras blessé et il grimaça en sentant sa douleur se raviver. Jetant un coup d'oeil timide, il grimaça cette fois-ci de dégoût : décidément ce n'était pas beau à voir... Et il perdait beaucoup de sang... Il voulut toucher son bras pour voir s'il n'était pas cassé mais la douleur fut telle qu'il en eut le souffle coupé et il préféra attendre sagement Kaiji. Il avait fait assez de bêtises comme cela pour l'instant.
Le jeune homme revint d'ailleurs trés vite, amenant avec lui son sac et Rochiel le regarda fouiller dedans, trés énervé. A tel point que des larmes en vinrent bientôt à couler de ses yeux. Le jeune homme semblait véritablement sur les nerfs et Rochiel se sentit aussitôt coupable.

"Enfin !"

Apparemment, Kaiji avait trouvé ce qu'il voulait, et ceci en vidant brutalement son sac au sol. Il s'approcha de lui, l'aida à retirer sa chemise, ce que Rochiel fit en grimaçant, et s'occupa de son bras. Il prit un morceau de tissu qu'il imbiba d'un liquide avant de le poser sur sa blessure : la brûlure fut immédiate et Rochiel sursauta brusquement, sa main libre partant s'accrocher au bras de Kaiji pour trouver un appui.

" Bon sang... " lâcha-t-il, les dents serrées.

Il déglutit difficilement avant de lâcher le bras de Kaiji, conscient qu'il devait peut-être serrer un peu trop fort et donc lui faire mal.

" Pardon... "

Il serra les dents tout le reste du temps qu'il fallut à Kaiji pour nettoyer sa plaie et la bander, fermant parfois les yeux quand la douleur était trop vive. Il ne voulait pas crier pour ne pas effrayer son esclave, mais l'envie le démangeait.
Une fois le bandage fait, Rochiel souffla un peu, et jeta un regard au fauve mort.

" On devrait partir avant que l'odeur du sang n'attire d'autres fauves..."

Il avait raison : avec le vent qui soufflait entre les herbes, les prédateurs allaient bientôt pulluler.
Il leva les yeux sur Kaiji et sa main repartit sur sa joue essuyer les dernières traces de larmes.
Il lui sourit faiblement, essayant de le rassurer.

" Tout va bien d'accord... Kaiji, il ne faut pas s'inquiéter. "

Il voulait avant tout rassurer le jeune homme car il ne voulait absolument pas le voir pleurer une nouvelle fois à cause de lui....

" Bon sang... "

Kaiji se doutait bien de la réaction de son maître. Hélas, il n'y pouvait pas grand chose et cela le chagrinait. Il avait sursauté sous la vive brûlure que lui infligeait le produit et la force avec laquelle il s'aggripait à son esclave était quelque peu douloureuse.

" Pardon... "

"Ce n'est rien."

*Rien comparé à la douleur de votre blessure...*

Kaiji banda correctement son bras et il renonça à l'idée de demander à Rochiel de faire demi-tour afin de consulter un médecin qui serait certainement mieux qualifié que lui pour lui prodiguer des soins. Il soupira puis une fois son travail d'infirmier improvisé terminé, il rangea le tout dans la trousse un peu plus vide puis se hâta de ramasser ses vêtements et les vivres pour les fourrer dans son sac. Le brun se tourna ensuite vers son maître qui fixait le cadavre de la bête.

" On devrait partir avant que l'odeur du sang n'attire d'autres fauves..."

"Vous avez raison."

L'esclave se rendit soudain compte qu'il oubliait quelque chose. Il fouilla les herbes hautes et n'eut pas à chercher bien longtemps pour tomber sur son épée qu'il avait lâchée en se jetant près de son maître. Lorsqu'il revint vers Rochiel, celui-ci essuya doucement les traces de larmes sur ses joues en lui souriant faiblement.

" Tout va bien d'accord... Kaiji, il ne faut pas s'inquiéter. "

Kaiji acquiesça d'un simple signe de tête et rendit son sourire au blond. Ce qui comptait pour le moment s'était partir d'ici et vite. Il se mit à avancer tout en jetant des coups d'oeil inquiets à son maître. Une question ne cessait de lui tourner dans l'esprit: Kaiji se demandait pourquoi le fauve ne l'avait pas attaqué lui ? Pourtant, il l'avait frappé d'un coup d'épée et il était resté plaqué sur Rochiel comme si...

*Comme si c'était un fauve intrus sur son territoire...*

Pris dans ses pensées, le brun se prit les pieds une seconde fois les pieds dans une motte d'herbe sauf que cette fois-ci, il eut la chance et le réflexe de se rétablir avant de s'étaler de tout son long.

Kaiji lui sourit gentiment et cela réchauffa le coeur de Rochiel qui se sentit prêt à repartir. Il se leva doucement, faisant attention à son bras, et reprit leur chemin entre les hautes herbes. Kaiji lui lançait de fréquents petits coups d'oeil pour voir si tout allait bien et Rochiel lui sourit pour le rassurer. Son bras l'élançait mais heureusement, il ne l'empêchait pas d'avancer.
Et le plus important actuellement aux yeux de Rochiel, c'était de partir trés loin du cadavre du fauve. L'attaque avait réveillé ses sens animaux au plus fort degré et même à plusieurs mètres de là, le vent transportait l'odeur forte du sang, une odeur entêtante qui enivrait légèrement. Elle dégoûtait Rochiel mais il savait que tous les animaux ne pensaient pas comme lui et la trouvait plutôt attirante au contraire. Les prédateurs ne seraient pas longs à rappliquer...
Sur le coup, trop surpris de l'attaque du fauve, Rochiel n'avait même pas pensé à se transformer... Et avec le recul, il se bénissait pour cela : comment aurait réagi Kaiji s'il avait vu deux fauves s'affronter, sans aucune trace physique de son maître? Trés mal certainement...
Ils avançaient depuis un certain temps, Rochiel marchant à peine plus lentement à cause de son bras. Il avait perdu du sang et se sentait un peu plus essoufflé, mais heureusement pour lui, il pouvait encore marcher sans trop de problème.
Une rafale de vent plus forte que les précédentes lui ébourriffa les cheveux et Rochiel s'arrêta brusquement, surpris par l'odeur qu'elle venait de lui apporter.

" Kaiji, dépêche-toi..." gronda-t-il avant de se remettre à avancer, beaucoup plus vite cette fois-ci, forçant sur ses muscles.

Un autre fauve rôdait aux alentours, Rochiel ne pouvait pas se tromper... Un... ou plusieurs... L'odeur était encore assez confuse, mais en tout cas, ils semblaient se diriger vers eux, et c'était surtout cela qui avait effrayé Rochiel.
Avançant toujours, son regard tomba soudain sur ses vêtements. Ils étaient couverts de sang!!! Evidemment, c'était cette odeur qui les attirait!!

" Et merde!! " s'exclama-t-il, furieux.

D'un geste rapide, il retira sa chemise gorgée de sang et la jeta au loin, avant de prendre la main de Kaiji pour l'entraîner plus rapidement à sa suite, torse nu.

" Il faut qu'on se dépêche!"

Il hâta le pas, légèrement essoufflé. L'odeur des fauves se faisait plus forte : ils s'étaient lancé en chasse... Et en étant un lui-même, il savait déjà comment ils procéderaient... Ils les encercleraient pour ne leur laisser aucune chance avant de se jeter sur eux.
Qu'ils tentent quoi que ce soit contre Kaiji... Et Rochiel leur montrerait de quelle nature il était faite!!!

Kaiji suivait toujours son maître, ils avançaient en silence lorsque le blond s'arrêta soudainement.

" Kaiji, dépêche-toi..."

Rochiel se remit en route, et le brun pressa le pas pour le suivre, se demandant ce qui pouvait bien inquiéter son maître. Il ne lui posa cependant pas la question, trop occupé à économiser son souffle pour ne pas perdre son maître.

" Et merde!! "

L'esclave était cette fois-ci bien décidé à lui demander ce qui n'allait pas mais il fut pris de court par l'attitude du blond qui retira précipitamment sa chemise avant de le prendre par la main et de le traîner derrière lui.

" Il faut qu'on se dépêche!"

"Qu'est-ce qu'il y a ?"

Kaiji avait à peine posé sa question que déjà une sourde tension étreignait son coeur. Ils étaient suivis ! Il l'avait été une fois et il se souviendrait toute sa vie l'horrible sensation qui s'était emparé de lui à ce moment-là. Et cette fois, ça recommençait. Autour d'eux le vent soufflait et pourtant, à certains moments les hautes herbes s'affaissaient étrangement, comme si quelque chose s'y promenait.

"Aah !"

L'esclave avait aperçu une créature dans les herbes, et le grognement sourd qu'elle avait poussé l'avait involontairement fait crier. Il sursauta encore à un autre grognement, comme une réponse, provenant du côté opposé au premier.

"Il y en a d'autres ?!"

Le coeur de Kaiji battait la chamade tant à cause de la course que par la trop grande proximité des fauves. En tuer un était une chose, affronter une meute de fauves en était une autre. Il était difficile pour lui de ne pas céder à la panique. Il serra légèrement la main de son maître. A découvert comme ils l'étaient, il était aisé pour les bêtes de se faire un festin. Hélas, il n'y avait pas d'endroit où se cacher.

"Qu'allons-nous faire ?"

A cet instant précis, les hautes herbes s'écartèrent lentement et un félin en tous points semblable à celui qu'ils avaient laissé plus loin apparut, les babines retroussées sur des crocs acérés. La bête grondait et d'autres mouvements dans les herbes indiquaient qu'il n'était pas le seul à vouloir festoyer.

"Aah !"

Rochiel tourna la tête quand il entendit le cri de son esclave vers les hautes herbes.

" Qu'est-ce qui se passe?? " paniqua-t-il, conscient que les fauves se rapprochaient de plus en plus.
Un grognement se fit entendre, ce qui fit sursauter Kaiji et crisper Rochiel.

"Il y en a d'autres ?!"

La main de Kaiji serra brusquement la sienne et Rochiel pu sentir le pouls du jeune homme qui avait accéléré. Visiblement, il était complètement terrorisé et Rochiel le comprenait en partie : lui-même n'en menait pas large.... Mais il avait quelqu'un à défendre et surtout, son instinct animal reprenant le dessus, il ne comptait pas se laisser faire sans se battre.
Il voulut répondre au grognement mais Kaiji cria soudain:

"Qu'allons-nous faire ?"

C'est à ce moment-là qu'un énorme fauve surgit entre les herbes, posant sur eux deux prunelles dorées excitées par l'odeur du sang. Rochiel fronça les sourcils, furieux de cette proximité : les fauves étaient des créatures solitaires et Rochiel ne dérogeait pas à cette règle. D'une manière générale, il détestait être approché par l'un de ses congénères.
Kaiji à ses côtés n'en menait pas large, d'autant plus que d'autres mouvements s'annonçaient dans les herbes. Se repérant à l'odeur, Rochiel comprit trés vite qu'il s'agissait d'une mère et de ses deux petits. Le plus gros fauve qui avait osé sortir le premier sentait encore le lait... Ses petits étaient à peine en âge de chasser.
Lui et Kaiji était l'exercice idéal... Sauf si Rochiel se transformait : la femelle ne mettrait pas ses petits en danger inutilement...
Mais il fallait pour cela se changer devant Kaiji... Accepterait-il?
Cependant, ils n'avaient guère le choix : la femelle se rapprocha en grondant et bientôt, ses deux petits sortirent des herbes, montrant dangereusement les crocs. Pour eux, ce n'était qu'un jeu, mais Rochiel savait combien ils pouvaient être dangereux.
Il repoussa Kaiji derrière lui, se plaçant entre les fauves et lui. La femelle gronda, posant ses yeux hypnotisants sur lui.
Elle comptait attaquer:
" Je ne te laisserais pas ce plaisir..." gronda à son tour Rochiel. "Kaiji, reste en arrière et surtout n'interviens pas!!"

Il repoussa un peu brutalement Kaiji, le mettant ainsi à l'abri, avant de tomber à genoux au sol. Tant pis si son esclave le voyait: cette fois-ci, ils ne pouvaient plus plaisanter, la femelle se montrait trop menaçante.
Rapidement, ses mains s'aplatirent, s'élargirent alors que ses jambes rétrécissaient. Son corps s'épaissit, devenant plus noueux, plus musclé, et il se couvrit d'un pelage jaune couvert de tâches brunes. Un grondement sourd sortit de sa gorge et ses deux yeux, leur prunelle rétrécie en une fente verticale, lancèrent un avertissement aux trois fauves. Ses oreilles se dressèrent, aux aguets, et enfin il put se tenir sur ses quatre pattes, sa queue battant furieusement l'air.
Il émit un feulement menaçant et la femelle baissa les oreilles, comprenant qu'elle avait affaire à forte partie.
Elle avait en face d'elle un jeune mâle léopard dans toute la force de sa jeunesse. Certes, l'animal se tenait uniquement sur trois pattes, la quatrième étant étrangement repliée comme s'il ne pouvait pas la poser à terre, mais néanmoins il restait un danger potentiel pour ses petits.
Elle gronda mais Rochiel s'avança vers elle félinement, écrasant les herbes sous ses pattes de velours, n'hésitant plus à poser sa patte blessée comme pour montrer qu'elle lui importait peu. Il s'en servirait tout autant dans un combat.

La femelle fit un mouvement vers Kaiji et Rochiel gronda encore plus fort, esquissant un geste vers ses petits qui se contentaient de regarder la scène, ne comprenant pas tout....
Rochiel semblait ainsi lui dire : tu l'attaques, je m'en prends à tes petits.
Ils s'affrontèrent du regard, l'un comme l'autre n'osant plus bouger....

"Kaiji, reste en arrière et surtout n'interviens pas!!"

Son maître l'avait poussé un peu brutalement mais Kaiji s'en fichait éperdument, il n'avait nullement l'intention de le laisser se battre seul. Cependant, il n'eut le temps de rien faire car Rochiel tomba à genoux et le brun voulut se précipiter vers lui mais il stoppa net son geste. Pour deux raisons. La première était l'avertissement du blond. Et la seconde était que son maître... Se transformait !?

"Que...?!"

Kaiji porta ses mains à sa bouche, complètement désarçonné par les évènements. Rochiel se changeait en léopard. L'esclave ne bougeait plus trop effrayé et admiratif face à cet incroyable spectacle. Il réussit à se détacher de l'image du léopard lorsque que le fauve voulut se diriger vers lui. Son maître ainsi métamorphosé fit lui aussi un mouvement mais en direction des deux autres félins qui n'avaient pas bougé.

Les deux bêtes se toisaient en silence. Kaiji ne savait pas quoi faire et il attendit. Pas bien longtemps cependant. Le fauve découvrit des crocs monstrueux dans un grognement sourd. Le félin se ramassa sur lui même, soufflant en retroussant les babines. Le brun, instinctivement et à tout hasard, posa sa main sur le pommeau de son épée. L'animal se jeta sur le léopard, le renversant dans les herbes. Les deux autres restés en retrait feulèrent comme pour l'encourager.

Kaiji voulut crier mais les sons restaient bloqués dans sa gorge. Il ne voyait que deux formes jaunes-orangées qui roulaient l'une sur l'autre, grognant pour intimider son adversaire, claquant violemment des mâchoires. Puis dans la mêlée, il y eut une sorte de cri et les deux animaux se séparèrent. Le léopard posa ses quatre pattes au sol tandis que l'autre léchait en grondant une vilaine morsure à l'une des pattes avant.

Le fauve chargea à nouveau mais cette fois, le combat fut bref. Le léopard ouvrit la gueule en grand et referma avec force ses puissantes mâchoires sur la gorge exposée de la bête. Le brun sursauta et eut la pensée de cacher à sa vue cette scène mais son corps ne réagit pas. Le léopard semblait dégouté et il laissa tomber le inerte de son assaillant. Les deux autres bêtes parurent un instant perdues puis l'une d'elles se faufila lentement vers les combattants. Cette fois, Kaiji put enfin bouger et brandissant son épée, il se plaça entre lui et son maître qu'il avait toujours du mal à reconnaître.

"Va-t-en !!"

Le brun savait pertinamment que c'était stupide de dire ça mais il devait dire quelque chose. L'animal leva les yeux vers lui puis se tourna vers son congénère qui fuyait à travers les hautes herbes. La bête ne chercha pas plus loin et déguerpit à son tour. Complètement déstabilisé, l'esclave se laissa choir au sol, le métal de la lame tintant étrangement sur la terre sèche. Puis, il tourna ses yeux vers le léopard.

"M... Maître...?"

[c'est pas très cohérent je trouve... tant pis, il est tard XD]

La femelle n’avait pas vraiment compris son avertissement et au lieu de se jeter sur Kaiji, elle se ramassa pour bondir sur Rochiel lui-même !
Sous sa forme de léopard, le jeune homme avait beaucoup plus de force aussi se battre contre le fauve enragé ne lui posa pas vraiment de problème, même si l’une de ses pattes avant lui faisait un mal de chien. La femelle n’était pas assez forte pour un jeune mâle comme lui, mais par égard pour ses petits, il se contenta de la mordre à la patte violemment, lui arrachant un feulement de douleur. Par principe, les mâles ne tuaient pas les femelles, surtout lorsque celles-ci avaient des petits à charge, et cela était inscrit jusque dans leurs gênes. Le fauve se dégagea pour lécher sa plaie et Rochiel se contenta de la regarder en grondant, lui signifiant ainsi qu’il était temps pour elle de partir.
Mais elle ne semblait pas l’entendre de cette manière et bientôt, complètement enragée et énervée, elle se jeta une nouvelle fois sur lui, beaucoup plus violente et menaçante que la première fois !! Cette fois-ci, elle allait trop loin et Rochiel avait bien conscience que s’il ne faisait rien, elle risquait aussi de s’en prendre à Kaiji, et il ne pouvait même pas imaginer cela !
Aussi profita-t-il de la première ouverture que lui offrit la femelle pour lui attraper la gorge et serrer de toutes ses forces, mettant très rapidement fin au combat. Le fauve eut la respiration coupée et, sa trachée coupée, il s’effondra au sol, mort.
Le léopard mit un certain temps avant de le lâcher totalement, vérifiant ainsi que la femelle était bien morte. Le goût puissant du sang avait envahi sa gueule et il retroussait son museau, dérangé par l’odeur métallique et le goût doucereux du liquide carmin qui excitait ses papilles félines. L’animal aimait cela en lui, mais l’homme ne rejetait de toutes ses forces, dégoûté.
Il vit soudain Kaiji bouger et se placer entre lui et un des petits qui avait avancé dans leur direction. L’animal baissa les oreilles au cri de Kaiji, et quand ses prunelles croisèrent celles froides et menaçantes de Rochiel, il préféra prendre la fuite comme son frère, disparaissant de leur vue.
Kaiji, les jambes flageolantes, tomba au sol, laissant son épée glisser sur la terre sèche avant de se tourner vers le léopard qui l’observait tranquillement, sachant d’avance ce qui allait se passer et n’en était pas pour autant vraiment réjoui…

"M... Maître...?"

Un étonnement certain se lisait dans la voix de Kaiji, mais heureusement pour Rochiel, aucun dégoût.
Il aurait voulu prouver à Kaiji qu’il était bien son maître, et personne d’autre, mais il avait retenu l’animal si longtemps en lui qu’il avait du mal à reprendre sa forme humaine, non pas parce qu’il ne pouvait pas, mais parce qu’il ne voulait pas.
Sa belle-mère détestait apercevoir ne serait-ce que l’ombre d’un animal chez elle, et son père lui avait ordonné de ne pas se transformer chez eux pour éviter les perpétuelles disputes à ce sujet. Rochiel avait obéi et ne ressortait son côté animal que très rarement, mais à chaque fois, cela lui faisait un bien fou de jouer à nouveau avec ses muscles et se sentir enfin lui-même… Ou du moins une partie de lui-même…
Aussi, maintenant qu’il s’était transformé, son côté animal l’envahissait tellement qu’il n’avait pas tellement envie de reprendre son apparence humaine de suite… Mais Kaiji allait s’inquiéter, et cela, Rochiel ne le voulait absolument pas.
Il fit un pas en direction de l’humain, ses pattes de velours se frayant un passage entre les herbes hautes. Nul feulement ni grognement, rien pour effrayer le jeune homme.
Il se contenta de poser un regard assuré sur Kaiji, et d’avancer doucement vers lui. Il s’arrêta à quelques centimètres de son esclave et tendit lentement son museau vers lui, abaissant ses oreilles comme pour montrer qu’il ne lui voulait aucun mal, se présentant au contraire de façon conciliante pour un félin.
Il alla toucher la main de Kaiji, toujours très doucement, et la lécha gentiment, avant de relever son regard doré sur l’esclave, ses yeux lui adressant une requête silencieuse en le priant de l’accepter.
Puis il leva sa patte et la posa sur la jambe de Kaiji très délicatement, toutes griffes rentrées pour éviter de le blesser, et le poussa doucement, comme pour l’inciter à réagir.
L’air très surpris de Kaiji l’amusait un peu, et en même temps l’ennuyait car il avait terriblement peur que le jeune homme ne l’accepte pas tel qu’il était…

[Kya ! >_< Trop chou ton post !! ^^]

Le léopard s'était approché de lui tranquillement, comme pour ne pas l'effrayer. Kaiji l'était un pei malgré tout. L'animal tendit le museau vers lui après s'être arrêté tout près de lui. Mais il était tellement surpris qu'il ne réagit pas immédiatement. Le fauve posa alors sa patte sur sa jambe et la poussa, comme pour lui dire "Alors, tu dors ?".

"Je..."

Finalement il tendit ses doigts blancs vers le pelage doré du léopard, sentant la chaude fourrure sous sa peau. L'autre main rejoignit bien vite la première et ses doigts s'enfoncèrent dans les courts poils derrière le crâne de l'animal. Un sourire béat d'enfant découvrant un nouveau jouet au pied du sapin étirait ses lèvres et après un long moment à contempler cette créature si incroyable, le brun réduisit à néant l'écart qui les séparait, fourrant son visage dans le cou chaud et palpitant.

"Vous êtes tout doux..."

L'esclave avait l'impression d'être en plein rêve. Ses bras noués autour du cou du fauve, il ne voulait plus le lâcher. Une question stupide trottait dans son esprit mais il n'osait pas la poser. Il grattait doucement le dos de l'animal, comme s'il s'agissait tout simplement d'un chat plus gros que la normale. Il s'écarta légèrement et plongea ses prunelles brunes dans celles couleur de soleil de son maître. Aussi étrange que cela puisse paraître, il ne trouvait pas cela horrible ou dérangeant que celui-ci se soit changé en animal.

"Est-ce que vous ronronnez ?"

Trop tard ! Kaiji tira la langue en haussant les épaules. C'était vraiment une question stupide à ses yeux et puis surtout il se rendit compte que dans cet état, il serait sûrement difficile pour Rochiel de lui parler.

[Kaiji est trop kawai!!! >----< ]

Rochiel vit les doigts de Kaiji s’avancer vers lui et il ne bougea pas, sachant d’avance que le moindre de ses gestes pourrait effrayer inutilement l’humain. Il avait l’habitude que sous sa forme animale, les gens le rejettent, ayant trop peur de lui, et il avait appris qu’un fauve impassible faisait beaucoup moins peur…
Mais Kaiji ne semblait ressentir aucune crainte, bien au contraire : sa deuxième main rejoignit rapidement la première pour s’aventurer dans la fourrure chaude de Rochiel qui le laissa faire sans broncher, appréciant beaucoup trop le contact délicat de ces petites mains pour oser ne serait-ce que bouger. Il vit avec ravissement Kaiji sourire comme un enfant : il était bien le premier à l’accepter aussi facilement et avec une telle joie, et cela toucha profondément Rochiel.
L’esclave se montra bientôt plus hardi et enfoui carrément son visage à l’endroit du cou où la peau du léopard était plus douce et plus chaude, et murmura :

"Vous êtes tout doux..."

Si Rochiel avait été sous sa forme humaine, il aurait éclaté de rire : Kaiji était adorable…
Rochiel sentit bientôt les doigts de Kaiji le gratter affectueusement en haut de son dos et il n’osa cette fois-ci plus faire un seul geste : il aimait trop ça !! Pour un peu il en aurait ronronner, et la présence réconfortante du jeune homme contre lui était vraiment agréable. Il le sentait se blottir contre lui, appréciant la douceur et le moelleux de sa fourrure, et Rochiel, s’il était surpris que son esclave ne s’effraye pas plus que ça, était en tout cas vraiment ravi de ce contact touchant.
Mais il prit fin soudainement et Kaiji se détacha légèrement de lui pour lui demander :

"Est-ce que vous ronronnez ?"

L’esclave tira la langue, apparemment embarrassé de sa propre question et cela amusa énormément Rochiel. Si l’on s’était penché un peu sur l’expression qu’avait pris sa tête, son museau légèrement retroussé et ses yeux un peu rétrécis, on aurait presque pu croire qu’il riait, ce qui n’était pas loin d’être le cas.
Est-ce qu’il pouvait ronronner ? Mais Kaiji n’avait qu’à le vérifier !
Le léopard s’approcha un peu plus du jeune homme et vint se coucher dignement sur ses jambes pliées, son flanc touchant la taille de Kaiji, avant de venir frotter sa tête contre son torse, comme un gros chat en quête de caresses l’aurait probablement fait. Il fermait les yeux, appréciant à sa pleine mesure le frottement du tissu contre le haut de son crâne et ses joues, sentant la chaleur du jeune homme poindre en-dessous des habits. Et aussitôt un léger bruit naquit dans sa gorge, qui enfla rapidement avant de ressembler à une véritable machine à vapeur lancée à plein gaz…
Pour ronronner, Rochiel ronronnait !! Et il adorait ça….

Kaiji sursauta légèrement lorsque le fauve prit place sur ses jambes. Puis souriant toujours comme un gosse, il sentit avec ravissement le félin frotter sa tête contre lui et bien vite un grognement puissant monta de la poitrine de l'animal. Le brun éclata de rire puis répondit avec joie à la demande de caresses et de calins, enroula un bras autour du cou de son maître et gratouilla son flanc et de sa main libre, il papouilla le museau de l'animal. L'esclave avait l'impression d'avoir un gros chat sur les genoux et contrairement à beaucoup, cela ne le dérangeait pas le moins du monde.

"C'est incroyable !"

Le brun souriait toujours, continuant de caliner Rochiel, se demandant pourquoi celui-ci ne lui avait pas parlé de cette particularité. Côté particularité, il avait également son lot et même si c'était difficile d'en parler, si un jour son maître lui posait la question, il y répondrait honnêtement. Posant rêveusement son menton sur le crâne du léopard, il soupira doucement d'aise. C'était un moment d'intimité et de calme qu'il garderait précieusement en souvenir. Puis il réalisa soudainement que le blond avait mis sa vie en jeu pour le protéger.

"Merci..." murmura-t-il. "Merci beaucoup..."

Chassant la pensée qu'il aurait pu être gravement blessé en plus de sa plaie au bras, à la patte plutôt, Kaiji posa un rapide baiser sur le bout du museau du fauve.

"Pardon..." souffla-t-il, réalisant trop tard son geste.

Le brun tenta un timide sourire et continua de caresser le crâne du félin dans des mouvements lents et apaisants. Une brise régulière et légère s'était levée, soulevant délicatement la sombre chevelure de l'esclave. Celui-ci, blotti contre l'énorme boule de fourrure et de chaleur, se sentait partir à la dérive, le sommeil le gagnant à moitié.

"On devrait peut-être reprendre la route..." suggéra-t-il en retenant avec peine un bâillement.

En réalité, Kaiji avait dit cela uniquement pour la forme. Le soleil n'en était même pas à la moitié de sa course qu'il avait déjà envie de dormir. Peut-être étaient-ce les événements et le réveil trop matinal qui l'avaient épuisé. En tout cas, une chose était sûre: il allait falloir à Rochiel beaucoup de courage et de patience pour le faire bouger de là.

[désolée -_-" j'ai été influencée par Elphege, à force de dormir, il a déteint sur Kaiji XD]

Rochiel avec joie Kaiji éclater de rire et ravi, il sentit son esclave le caresser gentiment, le poussant à ronronner encore plus fort. Kaiji semblait connaître les endroits où les caresses étaient vraiment délicieuses et le fauve se laissa faire, trop heureux de profiter de ce petit moment agréable en compagnie de Kaiji. De plus, c’était la première fois qu’il l’entendait rire depuis qu’il le connaissait, et il devait avouer qu’il adorait ce son. C’était un rire clair, légèrement enfantin, coulant sur Rochiel comme une brise rafraîchissante.
Lorsqu’il sentit Kaiji le caresser sur le museau, il ne pu s’empêcher de sortir sa langue et lui donner de petites léchouilles sur ses mains, le remerciant à sa façon. Le fauve était aux anges : il était enfin sorti, libre, et en plus il recevait des caresses gratuites et si gentilles qu’il serait resté là des heures sans bouger, trop heureux. Il ronronnait pire qu’une turbine lancée à fond.
Kaiji posa son menton sur le dessus de son crâne et le léopard ferma les yeux, les plissant dans une petite moue satisfaite.

"Merci..." murmura-t-il. "Merci beaucoup..."

Rochiel ne pouvait pas répondre sous cette forme, aussi se contenta-t-il de feuler très doucement, un léger grognement naissant dans sa gorge entre deux ronronnements. Il devinait aisément pourquoi Kaiji le remerciait, mais il ne pensait pas que ces remerciements étaient mérités selon lui. Après tout, il n’avait fait que remplir sa promesse : il avait juré à Kaiji de toujours le protéger et c’était ce qu’il avait fait. Il s’en serait de toute façon voulu à mort s’il était arrivé encore une fois la moindre chose à Kaiji. Sans qu’il s’en rende compte, le jeune homme était en train de se faire une place considérable dans son cœur…
Il sentit soudain Kaiji déposer un petit baiser sur son museau et s’il n’avait pas été sous sa forme animale, Rochiel aurait sûrement rougi. Heureusement, sa fourrure n’avait pas cette particularité. Son esclave s’excusa et lui sourit. Il était si touchant à cet instant que Rochiel ne pu s’empêcher de se bouiner un peu plus contre lui, appréciant pleinement les nouvelles caresses qu’il lui prodiguait au-dessus de son crâne. Il ferma les yeux, ravi, et ronronna. Kaiji avait de petites mains très délicates, expertes en caresses… Il le sentit se blottir contre lui, murmurant :

"On devrait peut-être reprendre la route..."

Son baîllement n’échappa pas à Rochiel qui comprit que Kaiji était à bout de force. Il lui fallait se reposer… Pour l’instant, ils étaient relativement à l’abri : le fauve non loin d’eux laissait échapper une odeur étrange et malsaine, celle de la mort, et Rochiel savait que cela ferait fuir les autres prédateurs pendant un moment. Ils pouvaient se permettre une petite pause sans aucune crainte. Rochiel aussi commençait à fatiguer pour sa part, peut-être à cause de sa blessure et de la perte de sang… Il avait besoin de se reposer lui aussi….
Il se releva légèrement, juste pour s’écarter et se coucher dans l’herbe, offrant son flanc à Kaiji comme oreiller, avant de feuler doucement pour l’inciter à le rejoindre.
L’esclave comprit et se coucha contre lui, se bouinant comme un enfant contre sa fourrure chaude. Rochiel le regarda avec attendrissement, satisfait, avant de se mettre à lécher doucement sa plaie à la patte. Une fois qu’il l’eut correctement nettoyé, il se sentit fatigué et sombra à son tour dans un sommeil lourd.
Lentement, son corps reprit sa forme humaine pendant son sommeil, la tête de Kaiji reposant sur son ventre…

Kaiji tombait littéralement de sommeil. Lorsque son maître se leva pour se coucher un peu plus loin, il se hâta de le rejoindre, comprenant à moitié ce feulement. Aussitôt eut-il posé sa tête contre la fourrure du léopard qu'il s'endormit sans demander son reste. La douce chaleur des rayons du soleil, celle dégagée par le fauve conjuguées à la douce brise, tout était un cadre idéal pour dormir. Le sommeil le retint encore un long moment et l'astre diurne déclinait déjà lorsqu'il ouvrit enfin les yeux. Le brun savait les journées longues ici et il trouvait qu'ils avaient beaucoup dormi: au moins quatre ou cinq heures. Ne s'étant pas aperçu du retour à la normale du corps du blond, il tourna lentement les yeux vers la tête de l'animal et contrairement à ce qu'il s'attendait à voir, il découvrit le visage endormi de son maître. Un constat se fit jour dans son esprit. S'il voyait son visage et ses épaules nues cela voulait dire que...

Kaiji se redressa vivement, les joues aussi cramoisies que le ciel paré des couleurs du couchant à cet instant. Puis il se souvint que Rochiel avait retiré sa chemise couverte de sang dans leur course pour échapper aux fauves. Il risqua un oeil vers son maître et soupira de soulagement lorsqu'il vit qu'il portait toujours le reste de ses vêtements. Un vent plus frais que la douce brise de l'après-midi se levait et le brun se leva pour aller chercher leurs deux sacs qu'ils avaient lâché dans la précipitation. Il n'eut pas à aller bien loin et revint vite auprès du blond. Il étendit une couverture sur lui afin qu'il ne manque pas de chaleur.

"Vu son état, je doute qu'on aille plus loin avant demain..." mumura-t-il pour lui-même.

L'esclave pensa donc qu'il était juste d'installer leur campement ici. Il partit donc en quête de quoi allumer un bon feu et il fut servi car en matière de brindilles sèches, la plaine en foisonnait. Une fois le tas de brindilles et de brins d'herbe secs, il fouilla dans son sac, ayant aperçu un peu plus tôt un très vieux briquet. Avec un sourire victorieux, il sortit l'objet convoité et sa joie grandit lorsque les flammes commencèrent à s'élever. Pour éviter de faire flamber la plaine entière, Kaiji posa autour de son feu un petit cercle de pierres. Enfin, il s'installa près de Rochiel, veillant sur son sommeil avec un sourire attendri.

"Encore merci..." chuchota-t-il alors que l'obscurité commençait à prendre place.

Le brun replaça une mèche dorée qui s'était égarée sur son front. Il s'était attaché si vite à son maître qu'il se demandait encore comment cela était possible. Secouant la tête pour chasser toutes les questions qui trottaient dans son esprit, il préféra se concentrer sur la contemplation de Rochiel endormi.

Rochiel avait repris sa forme humaine et dormait véritablement du sommeil du juste. Il se sentait si bien, le corps tout proche de Kaiji lui apportant une chaleur réconfortante. Il avait contenu si longtemps le fauve en lui que sa sortie récente l’avait épuisé, et il avait besoin de reprendre des forces.
A un moment, il lui sembla que la chaleur diminuait sensiblement, et il gémit un peu dans son sommeil, désirant retourner au chaud. Son souhait ne tarda pas à se réaliser et il sentit qu’on le recouvrait de quelque chose de doux et chaleureux, et il retomba dans un sommeil lourd et réparateur.
Il était vraiment bien, entouré de chaleur, et ses rêves furent très doux. Il se pelotonna un peu plus sous la couverture, gémissant de satisfaction comme un gamin. Il serait resté comme ça pendant des heures, mais toutes les bonnes choses ont une fin et sa conscience s’éveilla doucement.
Il se demanda pendant un instant pourquoi son lit était si dur et pourquoi il ne trouvait pas la sensation habituelle de ses draps fins sur sa peau, avant de réaliser qu’il n’était pas dans son lit… Il ouvrit un œil et tomba sur le visage fin de Kaiji qui l’observait, un petit sourire béat sur les lèvres.
Comprenant immédiatement la situation, il rougit tout en adressant un petit sourire timide à son esclave.

« Tu as pu te reposer… ? » dit-il gentiment en réfrénant un bâillement.

Il se sentait un peu gêné… Comment Kaiji allait réagir maintenant qu’il savait ? S’il avait semblé bien le prendre pendant qu’il était un fauve, Rochiel n’était pas sûr que cela durerait… Quel regard poserait-il sur lui désormais… ?
Un peu mal à l’aise, il détourna son regard et tenta de penser à autre chose.
Il se redressa et aperçut le feu crépitant : écarquillant les yeux de surprise, il fut ravi de voir que Kaiji y avait pensé. Normalement, il aurait dû le faire lui-même, mais sa sieste s’était prolongée… Au moins, le feu les protégerait durant la nuit d’autres prédateurs. Et puis leur veillée serait moins taciturne : Rochiel adorait rester prés d’un feu de camp la nuit, à bavarder tout en observant les étoiles…
Il s’étira paresseusement, tirant involontairement sur son bras. La douleur ne se fit pas attendre et il ramena vivement son bras contre lui en grimaçant de douleur. Son bandage s’était défait durant sa transformation mais heureusement, la plaie s’était arrêtée de saigner, sûrement cicatrisée grâce à la salive du fauve.
En relevant la tête, il aperçut le regard inquiet de Kaiji et il le rassura d’un sourire.

« Ne t’inquiètes pas Kaiji, je suis juste une petite nature… dit-il pour plaisanter. Par contre, ça serait vraiment génial si tu pouvais me refaire mon pansement… Le premier n’a pas survécu à ma transformation… »

Il lui tendit doucement son bras, faisant attention à ne pas réveiller la blessure, ressemblant à un gamin penaud qui a fait une grosse bêtise…
Il se sentait vraiment mal à l’aise, en sachant que désormais Kaiji connaissait son secret, et il ne savait pas comment réagir… Il fallait crever l’abcès, mais il ne se sentait pas le courage de le faire tout de suite….

Au bout d'un moment qui lui parut être une éternité, Kaiji vit enfin son maître ouvrir les yeux. Il mit d'ailleurs un certain temps à comprendre que celui-ci venait de lui parler, trop absorbé par sa contemplation.

"Euh... Je... Oui, ça allait..." bafouilla-t-il, ses joues le brûlant comme s'il avait le visage au-dessus des flammes.

Le brun le vit s'étirer avant de ramener vivement son bras: il avait dû réveiller sa blessure. Le sourire du blond le rassura un peu.

« Ne t’inquiètes pas Kaiji, je suis juste une petite nature… Par contre, ça serait vraiment génial si tu pouvais me refaire mon pansement… Le premier n’a pas survécu à ma transformation… »

L'esclave sentait l'atmosphère un peu tendue et il rit de bon coeur à la plaisanterie de Rochiel. Il se leva et fouilla dans son sac pour en resortir les bandages. Puis il vint tranquillement s'asseoir aux côtés de son maître, sans dire un mot, juste en lui souriant gentiment. Il commença son travail d'infirmier, cherchant silencieusement ce qui pouvait bien le mettre aussi mal à l'aise.

"Vous savez, vous n'étiez pas obligé de demander pour le pansement. Je le referais autant de fois qu'il le faudra." finit-il par dire, brisant le silence, un sourire réconfortant accroché aux lèvres.

Kaiji aimait bien lui sourire. Parce qu'au moins, le blond prenait la peine de le lui rendre la plupart du temps. Le silence revint et il acheva sa tâche. Lorsqu'il releva la tête, son visage s'était fait sérieux et un brin inquiet, ne voyant vraiment pas ce qui troublait Rochiel. Il avait beau chercher, il ne comprenait pas. Il avait toujours entendu parler d'histoires d'animorphes même s'il n'en avait jamais vu de ses propres yeux jusqu'à présent. Son âme était encore parfois celle d'un enfant et il trouvait cela parfaitement normal. Aussi cela l'inquiétait énormément de voir son maître muet et gêné de cette façon.

"Quelque chose ne va pas ?"

Tant sur son visage que dans sa voix, une anxiété profonde et sincère pour le blond se lisait aisément. Oubliant momentanément sa timidité, il posa délicatement sa main sur la joue de Rochiel, dont la peau était agréablement fraîche à cause de la légère brise froide qui soufflait. L'esclave ne savait pas trop quoi faire d'autre et, n'étant lui-même pas très à l'aise concernant l'expression des sentiments, ne voyait pas comment aider son si doux maître.

"Vous m'avez aidé. Et je veux vous aider. Qu'est-ce qui ne va pas ?"

Kaiji s’attela aussitôt à la tâche et s’occupa de refaire son bandage avec soin. Rochiel ne sentit absolument rien et en fut ravi : Kaiji avait vraiment des doigts de fée.

"Vous savez, vous n'étiez pas obligé de demander pour le pansement. Je le referais autant de fois qu'il le faudra."

Rochiel sourit, gêné.

« Tu es très gentil… » dit-il simplement, le pensant réellement.

Kaiji était vraiment quelqu’un de bien : Rochiel le connaissait à peine mais il se sentait si bien avec lui. Comme s’ils avaient été amis depuis toujours. Cela le surprenait mais en même temps le satisfaisait, parce que pour la première fois dans sa vie, le jeune homme ne se sentait plus seul. Il avait toujours vécu en solitaire, incapable de trouver quelqu’un qui puisse s’attacher un tant soit peu à sa personne, et se renfermant un peu plus sur lui-même chaque jour. Or, Kaiji avait réussi à percer cette carapace qu’il s’était forgé, et sa gentillesse avait séduit Rochiel. La preuve, en quelques jours, le jeune homme avait plus souri qu’en quelques années…
Seulement, il avait l’impression que cette belle amitié qui était en train de naître avait déjà une faille qu’il lui serait difficile de combler. Il ne s’était jamais vu comme un monstre à cause de l’animal en lui, mais sa belle-mère avait transformé le regard qu’il avait sur lui-même : obligé de se cacher et de réfréner sa véritable nature, il avait fini par croire que c’était anormal…
Or, il venait de se montrer tel qu’il était devant Kaiji… Qu’est-ce que ce dernier dirait… ?

De plus en plus inquiété par ses pensées, la voix de Kaiji le fit sursauter et lever la tête pour croiser son visage.

"Quelque chose ne va pas ?"

Il semblait inquiet par le mutisme de son maître, et ce que Rochiel lu dans les yeux de Kaiji le toucha profondément. C’était si agréable de savoir que quelqu’un s’inquiétait pour vous… On se sentait vivant et important…
La main de Kaiji s’avança vers sa joue et s’y posa délicatement. Rochiel ferma les yeux, appréciant la caresse fraîche sur sa peau. C’était si doux… Bon sang, il voulait tellement que rien ne change entre eux… Mais le regard de Kaiji allait changer, c’était inévitable.

"Vous m'avez aidé. Et je veux vous aider. Qu'est-ce qui ne va pas ?"

Troublé, Rochiel s’empara délicatement de cette main amie et, tournant la tête, il déposa un léger baiser à l’intérieur, fermant toujours les yeux. Puis il appuya son visage contre la main de Kaiji et soupira.
Il fallait qu’il le dise, maintenant, avant que Kaiji ne s’inquiète encore plus de son attitude.

« Je… J’aimerai faire un retour en arrière et que rien ne se passe comme ça… Je n’aurai pas été blessé, nous n’aurions pas été en danger et je ne… me serais pas transformé. Tu dois penser que je suis un monstre n’est-ce pas Kaiji… ? »

Rochiel ouvrit alors ses yeux et lança un regard suppliant au jeune homme, tenant toujours fermement sa main. Mais la lueur qu’il lu dans le regard de Kaiji lui donna espoir… Se pourrait-il que Kaiji ne le pense pas… ? Qu’il ne soit pas comme les autres ?

« Je suis à moitié homme, moitié léopard, et ce depuis ma naissance. Je ne voulais pas que tu voies ça mais… J’étais obligé. »

Il baissa la tête, se sentant misérable. Kaiji n’était qu’un esclave, après tout il n’aurait pas dû prendre en compte ses sentiments, mais à cet instant, l’avis de Kaiji comptait tellement aux yeux de Rochiel… En fait, il ne voyait même plus le jeune homme comme un esclave. Il était devenu un ami.

Kaiji vit Rochiel fermer les yeux lorsqu'il posa main sur sa joue. Comme s'il appréciait pleinement cette caresse. Cela ne l'empêcha pourtant pas d'être toujours aussi inquiet. Puis la main du blond se posa sur la sienne et les lèvres de son maître vinrent toucher la paume de sa main en chaste baiser, tendre et cependant si désemparé. Du moins ce fut ainsi que le brun le perçut. Le visage de Rochiel disparaut ensuite sous ses doigts, comme s'il cherchait à se cacher de quelque chose.

« Je… J’aimerai faire un retour en arrière et que rien ne se passe comme ça… Je n’aurai pas été blessé, nous n’aurions pas été en danger et je ne… me serais pas transformé. Tu dois penser que je suis un monstre n’est-ce pas Kaiji… ? »

L'esclave ouvrit de grands yeux surpris. Pourquoi le blond se mettait-il une telle idée en tête ? Rochiel poursuivit après avoir levé les yeux vers lui.

« Je suis à moitié homme, moitié léopard, et ce depuis ma naissance. Je ne voulais pas que tu voies ça mais… J’étais obligé. »

Son maître baissa la tête, comme s'il attendait qu'il lui porte le coup de grâce. Kaiji ne comprenait vraiment pas. Dans un élan de tendresse, le brun enroula ses bras autour du cou de Rochiel et l'attira à lui. Il espérait son étreinte réconfortante. Lui ne le voyait pas comme un monstre, alors pourquoi réagissait-il ainsi ? Peut-être avait-il vécu des choses qui lui faisat penser le contraire, qu'il devait avoir honte de ce qu'il est ?

"Je ne vous verrais jamais comme un monstre. Parce que vous n'en êtes pas un. Vous êtes juste différent."

Le brun enfouit doucement son visage dans la chevelure dorée de son maître. C'était à présent son unique raison de continuer à avancer. Il l'avait réconforté après les horribles évènements de la veille, il pouvait en faire de même, cela ne lui coutait rien. Ses doigts graciles jouaient distraitement avec une mèche couleur de soleil. A ce moment, un vieux souvenir lui revint en mémoire. Une douce chanson que fredonnait sa mère du temps où elle s'occupait encore de lui et qu'elle était cette femme douce et attentionnée. Une chanson qu'elle chantait pour l'apaiser lorsqu'il était triste. Alors doucement, Kaiji se mit à chanter pour apaiser la peine de Rochiel.

Il espérait vraiment aider le blond. Cela l'attristait qu'il puisse penser qu'il le voit comme un monstre ou une bête de foire. Sa voix s'élevait à peine dans l'air, comme s'il voulait que l'air ne tombe que dans l'oreille de son maître, comme si le reste du monde ne devait jamais l'entendre. Comme s'il offrait un bien que seul Rochiel pouvait voir.

» Un verre avant de rentrer [Elphege]