A couvert...

Kaiji s'empressa d'aider son maître à ranger les affaires dans leurs sacs et ce fut rapide car ils n'en avaient pas beaucoup. A sa grande surprise, Rochiel sortit d'un sac une légère couverture qu'il jeta sur ses épaules.

« Pas question que tu prennes froid ! Garde ça, ça devrait tenir un moment… »

Il se laissa ensuite entraîner par le blond, complètement trempé, en direction de la forêt qui longeait la plaine.

« On va essayer de gagner la forêt, là-bas nous serons un peu plus à l’abri du déluge ! Par contre, c’est beaucoup plus dangereux là-bas, alors ne me perds surtout pas, d’accord ? »

« D'accord ! » assura le jeune homme.

Il était tenu par le poignet mais il se dégagea doucement et prit la main de Rochiel dans la sienne, entrelaçant timidement ses doigts aux siens. La forêt était en vue mais il leur fallut un certain temps avant d'y parvenir. Une fois à l'orée des bois, ils s'arrêtèrent un instant pour souffler un peu. Par souci pour son maître, Kaiji s'approcha de lui et l'entoura de ses bras, le mettant ainsi un peu à l'abri de l'eau grâce à la couverture, et apprécia malgré tout la chaleur de son corps.

« Il ne faut pas attraper froid, vous non plus. »

L'esclave posa son front contre l'épaule humide de son maître, ravi de retrouver cette étreinte si sécurisante. Ses doigts se perdirent dans la crinière blonde. Il eut un léger frisson qu'il réprima facilement puis releva son visage vers Rochiel.

« Je crois qu'on peut y aller, sauf si vous voulez que je vous réchauffe encore un peu... »

Le brun rougit à ses propres paroles et se lova un peu plus contre la poitrine mouillée de Rochiel, ses bras entourant sa taille, comme pour être certain qu'il ne partirait pas sans lui.

[Désolé c'est un peu court ]

Rochiel avait senti Kaiji dégager son poignet de sa main et il l’avait regretté immédiatement. Mais comme pour répondre à ses souhaits, le jeune homme avait alors prit délicatement sa main, entrelaçant leurs doigts et Rochiel avait serré cette petite main dans la sienne, ravi, alors qu’un petit sourire venait se profiler sur ses lèvres.
Il ne savait pas ce qu’il lui arrivait ces derniers temps mais il se sentait vraiment bien. Son monde qui tournait auparavant autour de son père et de son entraînement avait maintenant comme centre Kaiji, et cela le surprenait et le comblait en même temps.
Ils leur fallut un bon bout de temps avant d’arriver jusqu’aux premiers arbres de la forêt mais Rochiel y entra comme on entre dans un sanctuaire : pour son flair entraîné, la forêt était le refuge de nombreux animaux ainsi que de nombreuses espèces… Les odeurs y étaient nombreuses mais le léopard s’y sentait à l’aise, chez lui…
Ils s’arrêtèrent un peu pour souffler et alors qu’il respirait l’air de la forêt, un petit corps chaud vint se blottir contre lui, l’entourant affectueusement.

« Il ne faut pas attraper froid, vous non plus. »

Toutes les odeurs furent aussitôt chassées par celle du brun qui posait délicatement son front contre son épaule, et ravi, Rochiel passa ses bras autour de lui, le resserrant contre lui. Il fallait ronronner lorsqu’il sentit les doigts fins de Kaiji passer dans ses cheveux mais il se retint, malgré tout envoûté. Kaiji était vraiment adorable et Rochiel sentit son cœur se gonfler de joie de l’avoir prés de lui.
Il déposa un petit baiser sur le front de son esclave avant de lui dire gentiment :

« Ne t’inquiétes pas pour moi, mon côté animal sait se défendre de la pluie. J’attrape rarement froid ! »

Néanmoins, l’étreinte de Kaiji lui faisait énormément plaisir, aussi ne repoussa-t-il pas le jeune homme, trop heureux de le sentir contre lui et que ce dernier ne lui fuit pas.

« Je crois qu'on peut y aller, sauf si vous voulez que je vous réchauffe encore un peu... »

Rochiel éclata de rire, surtout que Kaiji était revenu se bouiner contre lui, pire qu’un petit chaton… Animal auquel il ressemblait un peu à vrai dire…

« Au dirait que tu y prends goût jeune homme ! » s’exclama-t-il en riant. « Mais rassure-toi, moi aussi ! »

Il ébouriffa gentiment les beaux cheveux de Kaiji avant de déclarer :

« Il faut cependant qu’on avance un peu plus, nous sommes encore à la lisière de la forêt… Viens, on va s’y enfoncer un peu plus ! »

Il prit alors la main de Kaiji aussi tendrement que ce dernier l’avait fait avec lui et il l’entraîna dans la forêt entre les arbres. Ses sens animaux étaient en éveil, il se méfiait tout en retrouvant la forêt avec plaisir. Il jetait de temps en temps des coups d’œil à Kaiji histoire de voir s’il allait bien. Sous les arbres, la pluie était moins dense mais il faisait beaucoup plus froid et Rochiel s’inquiétait un peu… Surtout qu’ils ne pouvaient pas s’arrêter tout de suite, il sentait instinctivement que ce n’était pas le moment. Et puis ils venaient à peine de se réveiller !

« Surtout fais attention Kaiji… » répéta-t-il, inquiet. « Si tu vois le moindre truc suspect, tu me préviens…. »

Rochiel éclata de rire à ses paroles et il n'en rougit que plus.

« Au dirait que tu y prends goût jeune homme ! Mais rassure-toi, moi aussi ! »

Il sentit la main de Rochiel passer dans ses cheveux.

« Il faut cependant qu’on avance un peu plus, nous sommes encore à la lisière de la forêt… Viens, on va s’y enfoncer un peu plus ! »

Son maître lui prit la main avec douceur et l'entraîna un peu plus profondément dans les bois. C'était agréable, malgré la pluie, d'être tous les deux main dans la main. Le brun regardait tout autour de lui avec des yeux étonnés et avides d'en découvrir plus. Lui qui avait vécu enfermé pour « subsister aux besoins de sa mère » n'avait jamais vraiment vécu près de la nature et il était enchanté de partir ainsi à l'aventure. Certes il faisait un peu frais mais cela ne le dérangeait pas vraiment.

« Surtout fais attention Kaiji… Si tu vois le moindre truc suspect, tu me préviens…. »

« Je fais attention. » assura le jeune homme avec un sourire.

Ses doigts se serrèrent un peu plus. Les gouttes de pluie traversaient un peu plus difficilement le rideau de branchage qui formait comme une voûte au-dessus d'eux mais celles qui passaient étaient vraiment glaciales. Au bout d'un moment, Kaiji se secoua doucement pour chasser les gouttes qui coulaient dans son cou. Et puis le bruit de l'eau qui tombait commença à faiblir puis cessa complètement. Un premier rayon de soleil traversa les feuillages et bien vite, une sorte de chaleur lourde naquit dans la forêt. L'esclave laissa la couverture glisser de ses épaules car il commençait à avoir très chaud.

« Finalement, ce n'était que passager. » constata-t-il en jetant un regard à son maître. « Tant mieux ! »

Ayant décidément le chic pour se casser la figure, il buta contre une racine qui dépassait du sol et perdit l'équilibre. Au dernier moment, il pu se rattraper. Il soupira de soulagement et afficha une petite mine penaude en se tournant vers Rochiel.

«Désolé... »

Il baissa les yeux et s'excusa encore, honteux de toujours s'affaler sans arrêt. Il se sentait terriblement inutile aux côtés de Rochiel, lui qui avait risqué sa vie et qui avait été blessé, qui avait un pouvoir si particulier. Alors que le brun -hormis son épée, grâcieux cadeau du blond- n'avait aucun moyen de se défendre et les quelques notions d'arts martiaux qu'il avait pu apprendre n'étaient certainement pas suffisantes dans une réelle confrontation. Il détourna carrément les yeux, sa main toujours dans celle de Rochiel, navré d'être un fardeau pour ce dernier.

La pluie s’espaça, rendant leur traversée moins laborieuse, puis disparu bientôt, et le soleil revint très vite.

« Finalement, ce n'était que passager. Tant mieux ! »

« Oui, je préfère marcher sous le soleil que sous la pluie. Mais fais attention, le sol mouillé est très glissant ! » le prévint gentiment Rochiel.

Comme s’il l’avait calculé, Kaiji se prit soudain le pied dans une racine et il faillit tomber, s’il ne s’était pas rattrapé à temps. Rochiel se retourna, inquiet à l’idée qu’il ait pu se faire mal:

« Kaiji, tout va bien ? »

Le jeune homme avait une petite mine toute penaude attendrissante qui arracha un sourire attendri à Rochiel.

«Désolé... »
« Voyons, ce n’est pas grave, mais fais attention parce que tu pourrais te faire vraiment mal ! »

Mais Kaiji baissa les yeux, apparemment mal à l’aise et gêné. Quelque chose semblait le tracasser : son air joyeux avait disparu, laissant place à une étrange humeur qui intriguait et inquiétait le blond.
Il s’arrêta et força Kaiji à relever le menton de sa main, avant de lui lancer un regard inquiet :

« Kaiji, tout va bien ? »

Il passa sa main sur son front, essayant de savoir s’il avait de la température. Peut-être que le jeune homme avait attrapé froid. Mais il ne sentit rien de particulier, même si ses propres mains étaient froides et mouillées, et donc peu habiles pour détecter de la température chez quelqu’un.

« Tu as attrapé froid ? »

Pourtant, depuis qu’il ne pleuvait plus, l’air était chaud et agréable ! Rochiel ne comprenait pas ce qui se passait, et voir Kaiji dans cet état ne lui plaisait pas du tout.

« Kaiji, s’il y a quelque chose, tu dois me le dire ! » dit-il un peu autoritairement, espérant que cela déciderait le jeune homme.

Mais un bruit de brindille cassée l’arrêta net et il tourna la tête vers le bois, inquiet. Ses sens animaux mis en alerte lui indiquèrent qu’ils n’étaient plus seuls… 3,4, non ils étaient 5 ! Mais ils devaient être très forts pour que Rochiel ne les remarque que maintenant ! Et ils devaient bien connaître la forêt pour y être aussi à l’aise… Un combat maintenant serait le malvenu : avec son bras blessé, il aurait du mal à utiliser son arc…

« Cours Kaiji… » dit-il soudain très doucement.

Et comme le jeune homme ne bougeait toujours pas, il lui lança alors un regard intense et autoritaire :

« Cours ! On est suivis ! »

Rochiel tenta de savoir ce qui n'allait pas chez lui. Mais Kaiji refusa de répondre. Cependant, son maître ne voulait pas lâcher l'affaire.

« Kaiji, s’il y a quelque chose, tu dois me le dire ! »

« Je... » commença le brun.

Mais il n'eut pas le temps de finir sa phrase car le blond tourna la tête. Il vit une ombre passer sur le visage de Rochiel, ce qui n'engageait vraiment à rien de bon.

« Cours Kaiji… »

L'information semblait mettre un certain temps à parvenir jusqu'à son cerveau.

« Cours ! On est suivis ! » répéta Rochiel sur un ton un peu plus dur.

Kaiji sursauta légèrement, prit la main de Rochiel dans la sienne et se mit à foncer droit devant lui, suppliant le Ciel de lui permettre de ne pas tomber, ce n'était vraiment pas le moment. Soudain, l'air siffla à son oreille et dans sa course, il eut juste le temps d'apercevoir une flèche se ficher dans le tronc d'un arbre tout proche. Il se força un peu et accéléra l'allure, jetant un coup d'oeil rapide à son maître. Il avait l'air de tenir mais il avait toujours l'air inquiet.

Kaiji reportait son attention sur le chemin quand deux bras se tendirent hors d'un buisson. Il les évita de justesse, son coeur cognant dans sa poitrine, mais les doigts s'emparèrent d'un pan de sa chemise. De sa main libre, il tira de toutes ses forces et réussit à se libérer. Il pesta intérieurement contre lui-même car ils avaient perdu un temps précieux et ils risquaient de se faire prendre par leurs poursuivants. Un nouveau trait fusa, si proche de son visage qu'il pu trancher l'une de ses mèches. Cette fois, ce ne fut pas que deux bras mais tout un corps qui jaillit des fourrés et qui leur barra la route. Les autres assaillants les rattrapèrent rapidement et les encerclèrent. Kaiji recula jusqu'à sentir la chaleur du corps de Rochiel dans son dos. Cette fois il était décidé à ne pas être inutile ! Il posa la main sur la garde de son épée et défia du regard l'homme qui se tenait face à eux.

S'il s'agissait bien d'un homme car sous son masque de tissu qui ne laissait entrevoir que ses yeux à l'étrange couleur fauve, une sorte de museau se dessinait. Tous étaient armés d'arcs et de flèches et tous les mirent en joue. Le brun dégaina aussitôt, un peu déçu de ne pas pouvoir se dédoubler afin de faire entièrement écran pour protéger Rochiel. Un son étouffé, provenant de sous le tissu surprit Kaiji: l'homme face à lui venait de se mettre à parler un étrange dialecte. Les yeux sombres de l'esclave s'agrandirent tandis qu'il cherchait à déchiffrer cette langue incompréhensible. L'homme baissa ses armes et avança d'un pas vers eux puis baissa le tissu qui dissimulait son visage. Le brun pu alors observer qu'il avait en partie vu juste: le nez était semblable à celui d'un chat et des moustaches émergeaient de ses joues et un léger pelage blanc était visible de ce petit nez rose jusque dans son cou.

« Votre lame, veuillez la déposer. » ordonna-t-il de sa voix rauque.

« Dites d'abord à vos compagnons de baisser leurs arcs ! »

« Nous n'avons aucun ordre à recevoir, étranger. Vous êtes sur nos terres. Obéissez si vous tenez à la vie. »

Kaiji se mit à réfléchir: si on lui demandait de déposer son épée, c'était peut-être parce qu'ils n'avaient pas l'intention de les tuer, pas sur le champ du moins. Pourtant, il hésitait. Peu lui importait de mettre sa vie en jeu, c'était surtout celle de Rochiel qui comptait. Mais il avait promis de l'accompagner jusqu'à Sket et de le protéger quoi qu'il arrive. Il soupira puis se contenta d'abaisser sa lame et non de la déposer.

« Je ne m'en servirai pas sauf si vous vous montrez hostiles. »

La créature mi-homme mi-animal sembla comprendre qu'il avait affaire à quelqu'un de borné et qu'il n'obtiendrait rien de plus. Il soupira à son tour puis fit un geste et les quatre autres types remirent leurs hampes dans leurs carcans.

« Maintenant, nous pouvons discuter. Que faites-vous sur nos terres ? Le territoire des Linlei est sacré. Y pénétrer sans permission est passible d'une peine de mort. Répondez ou je vous abats sur le champ. »

Finalement, ils n'étaient pas vraiment sortis de l'auberge...

Kaiji comprit aussitôt de quoi il retournait et se mit à courir. Il s’était même attardé à prendre la main de Rochiel dans la sienne et si le jeune homme n’avait pas été aussi concentré sur leurs poursuivants, il aurait sûrement souri, touché de cette attention.
Malheureusement ceux qui les suivaient semblaient connaître parfaitement le terrain et ses dangers, et avançaient très rapidement. Rochiel arrivait à les sentir s’approcher, ses sens animaux exacerbés et décuplés au maximum. Il avait une furieuse envie de se transformer en animal pour pouvoir mieux se fondre dans le paysage et courir plus vite, mais d’une part il ne pouvait pas abandonner Kaiji et de l’autre, il ne savait pas du tout ce que pensaient leurs assaillants des animorphes… Il savait que certaines tribus les traitaient pire que des animaux et n’hésitaient pas à les abattre quand elles les rencontraient, et Rochiel ne tenait absolument pas à prendre ce risque.
Heureusement pour eux, Kaiji courait plus rapidement, mais malheureusement, ceux qui les suivaient semblaient être beaucoup plus rapides, et après de multiples tentatives d’attraper Kaiji en pleine course qui énervèrent fortement Rochiel, ils finirent par être totalement arrêtés par plusieurs silhouettes qui sortirent des buissons et se campèrent devant eux, leur coupant toute retraite et les encerclant très vite.
Rochiel s’arrêta, le souffle court et leur lança un regard noir. Il sentit bientôt Kaiji s’appuyer dans son dos et la tension qui habitait ses muscles ne lui échappa pas : il comptait se battre… Mais Rochiel doutait qu’il fasse le poids face à autant d’attaquants…
Un homme s’avança alors vers eux pendant que les autres les tenaient en joue avec leurs arcs et Rochiel dirigea son regard vers lui, essayant de percer le masque de tissu qu’il portait et qui lui mangeait le visage.
Quelque chose n’allait pas… Il pouvait le sentir de là où il était. Son instinct animal lui disait de se méfier et en même temps, il se sentait étrangement proche de l’individu. Cela le dérangea et il fronça les sourcils, cherchant ce qu’il n’arrivait pas à comprendre…
L’odeur de l’homme était étrange et en même temps familière, sa démarche frappait aux yeux de Rochiel dont le cerveau fonctionnait à vive allure pour tenter de comprendre qui était celui qui se tenait devant lui…
Il émit soudain un son bizarre et Rochiel sursauta en écarquillant les yeux : il était pourtant sûr de ne pas connaître cette langue… Mais il la comprenait parfaitement ! L’homme venait de dire à ses hommes de rester sur leurs gardes et de les abattre au moindre geste suspect. Rochiel porta la main à son front, ne comprenant pas du tout ce qui lui arrivait : il était tombé et avait pris un coup, ce n’était pas possible !
C’est alors que l’inconnu enleva son bandeau et tous les doutes de Rochiel s’évanouirent… Un homme-chat ! C’était un homme-chat ! Voilà pourquoi il se sentait si proche de lui, lui-même étant à moitié un félin.
Rochiel en avait déjà entendu parler mais n’en avait jamais vu, croyant plus à une légende, mais maintenant il avait la preuve formelle qu’ils existaient bien. Cela le laissa perplexe pendant quelques instants, moments pendant lesquels l’homme prit la parole :

« Votre lame, veuillez la déposer. » ordonna-t-il de sa voix rauque.

« Dites d'abord à vos compagnons de baisser leurs arcs ! »

« Nous n'avons aucun ordre à recevoir, étranger. Vous êtes sur nos terres. Obéissez si vous tenez à la vie. »

La réponse de Kaiji avait laissé le blond de marbre : il gardait les yeux fixés sur l’homme-chat, trop étonné et tentant de comprendre son fonctionnement pour pouvoir faire attention au monde qui l’entourait.
Il sentait pourtant la tension et l’inquiétude de Kaiji, il savait qu’il devait faire quelque chose pour l’empêcher de faire une bêtise mais il restait concentré sur l’inconnu, incapable d’en éloigner son esprit.

Finalement, Kaiji abandonna et baissa son épée, et leurs assaillants se calmèrent également.

« Maintenant, nous pouvons discuter. Que faites-vous sur nos terres ? Le territoire des Linlei est sacré. Y pénétrer sans permission est passible d'une peine de mort. Répondez ou je vous abats sur le champ. »

La voix de l’homme réveilla Rochiel qui posa sa main sur l’épaule de Kaiji pour l’apaiser et s’avança devant lui, les yeux fixés sur l’inconnu qui semblait être le chef du petit groupe.

« Nous sommes venus nous abriter de la pluie sous les arbres, mais nous ne pensions pas être entrés sur votre territoire, croyez-moi nous en sommes désolés… »

Il s’inclina poliment pour s’excuser, gardant son sang-froid, puis releva son visage pour regarder droit dans les yeux l’homme-chat :

« Cependant, vous n’avez rien à craindre de nous, je vous l’assure ! Vous pouvez me faire confiance… »

Et comme pour appuyer ses dires et révéler aux autres qui il était, il libéra son aura animale, la laissant s’épandre hors de lui. Il faisait toujours cela avant de se transformer, étant obligé de libérer son énergie animale mais il stoppa sa transformation à temps, juste avant de prendre la forme d’un léopard, et ravala en lui son énergie.
Les autres en restèrent ébahis. Leur chef pointa son doigt vers lui, très étonné. Ils avaient tous pu sentir cette aura, les animaux y étaient très sensibles et eux ne pouvaient pas rester de marbre face à cela.

« Tu es… Tu es un… Un… »

L’homme ne trouvait pas ses mots et Rochiel esquissa un petit sourire :
« Un animorphe oui… Je suis lié au léopard. Vous et moi sommes faits pour nous entendre… »

L’homme parut sceptique puis haussa les épaules.

« Bon, je veux bien vous croire, mais je suis obligé de vous amener à notre chef, lui décidera… Et cet humain-là ? » demanda-t-il, rétrécissant ses yeux et les pointant sur Kaiji.

Rochiel passa son bras autour des épaules du jeune homme, le mettant ainsi sous sa protection, tout en lançant un regard d’avertissement au chef des Linlei.

« Il est avec moi… Et je refuse qu’on lui fasse le moindre mal… »
« Bien… Suivez-nous et il n’y aura pas d’ennuis… »

Les Linlei les entourèrent, cependant plus amicaux maintenant qu’ils savaient qui était Rochiel, et les obligèrent à s’avancer dans une direction nommée. Rochiel serra Kaiji contre lui, refusant de le lâcher tant qu’ils ne seraient pas en totale sécurité… Quelque chose lui disait que les Linlei ne lui feraient rien, trop respectueux de l’esprit animal en lui, mais cela ne serait peut-être pas la même chose pour Kaiji…

La main de Rochiel se posa sur son épaule. Cela le rassura quelque peu. Il passa devant lui pour répondre à la question de cet étrange homme.

« Nous sommes venus nous abriter de la pluie sous les arbres, mais nous ne pensions pas être entrés sur votre territoire, croyez-moi nous en sommes désolés… »

Rochiel s'inclina devant cette créature et poursuivit.

« Cependant, vous n’avez rien à craindre de nous, je vous l’assure ! Vous pouvez me faire confiance… »

Kaiji ne comprit pas ce qui se passa ensuite. Cela était probablement dû au fait qu'il n'était qu'un simple humain. Il fixa son maître, cherchant à comprendre et au dernier instant, il crut le voir presque changer de forme. L'homme-chat le pointa du doigt en bégayant:

« Tu es… Tu es un… Un… »

« Un animorphe oui… Je suis lié au léopard. Vous et moi sommes faits pour nous entendre… »

« Bon, je veux bien vous croire, mais je suis obligé de vous amener à notre chef, lui décidera… Et cet humain-là ? »

Kaiji sentit aussitôt le bras de Rochiel s'enrouler autour de ses épaules.

« Il est avec moi… Et je refuse qu’on lui fasse le moindre mal… »
« Bien… Suivez-nous et il n’y aura pas d’ennuis… »

Les Linlei les encerclèrent masi ils semblaient moins hostiles. La démonstration de son maître avait dû leur attirer une certaine sympathie. Malgré tout, il ne se sentait pas à l'aise. Surtout qu'il ne comprenait pas un mot de ce que pouvait bien raconter ces hommes de la tribu Linlei. En effet, les hommes parlaient joyeusement, encore que leurs rires sonnaient surtout gras. Kaiji ne connaissait que trop bien ce genre de rire. Peu rassuré, il se blottit un peu plus contre le blond.

Ils marchaient, malgré les apparences, assez vite et ils atteignirent rapidement une sorte de village. Certaines huttes se trouvaient à quelques mètres du sol et les autres étaient construites sur la terre ferme. Deux hommes-chats s'approchèrent du brun l'un d'eux lui prit le bras. Le chef de cette petite troupe se tourna de nouveau vers eux.

« Je suis navré mais les humains ne peuvent pénétrer l'enceinte sacrée. » déclara-t-il. « Vous seul pouvez nous accompagner afin de rencontrer notre seigneur. »

Kaiji lança un regard suppliant à Rochiel, tentant de dégager son bras de l'emprise de son geôlier.

« Vous n'avez pas le choix. » intervint leur meneur. « Si vous refusez de laisser ce garçon ici, nous ne répondrons de rien. C'est la loi. S'il reste, il ne lui sera fait aucun mal. »

L'esclave soupira. Il n'avait pas le choix. Il fit un petit sourire à son maître.

« Ne vous en faites pas pour moi. Allez-y. »

Et l'homme-chat entraîna sans vergogne Kaiji vers un côté du village tandis que le meneur attirait Rochiel dans la direcion opposée. Il lança un dernier regard au blond, un regard le suppliant de revenir vite. Dès qu'il fut hors de vue, Kaiji se fit littéralement traîner. Le second gardien pouffait avec son compagnon et bien vite ils arrivèrent en vue d'une cahutte très à l'écart des autres. Lorsqu'ils l'atteignirent, on le jeta à l'intérieur sans douceur.

« On t'amène un nouveau jouet Griy ! » lança l'un d'eux.

Kaiji se releva lentement et la porte se referma aussitôt ce qui lui laissa à peine le temps d'apercevoir l'immense masse dans un coin de l'unique pièce sans fenêtre. Cette fois, il était vraiment pris au piège. Il faisait noir. Un noir si épais que cela en devenait effrayant. Il tourna la tête dans la direction approximative où devait se trouver le dénommé Griy. Son coeur battait si fort qu'il n'entendait que le battement du sang dans ses tempes. Il y eut pourtant un bruit de froissement et le crissement de la poussière du sol. La panique prenait le pas sur la raison et Kaiji, complètement terrorisé, se lança à l'endroit où pensait trouver la porte.

« Pitié ! Laissez-moi sortir ! »

Et dire qu'il n'y avait aucune issue. Il n'avait aucun moyen de s'enfuir de ce guêpier. Et comme par hasard, on lui avait retiré son arme. Il n'avait plus qu'à espérer que Rochiel lui vienne en aide.

[bon je ne suis pas tellement contente de ce post, mais j'espère quand même que ça ira !^^]


On les emmena à travers la forêt jusqu’à un petit village assez sommaire constitué de petites huttes en bois, dont certaines avaient été placées en hauteur. Rochiel avait suivi les discours des Linlei tout le long du chemin, Kaiji serré contre lui, apparemment inquiet et quelque peu effrayé. Rochiel le comprenait et l’avait pris contre lui en espérant ainsi le rassurer.
Les Linlei ne semblaient pas vraiment méchants mais assez sauvages tout de même, obéissant à un instinct primaire qui pourrait être dangereux si jamais ils essayaient de s’échapper aussi le blond ne tenta rien et se contenta de suivre sagement.
Mais arrivé devant les portes du village, un des Linlei s’empara de Kaiji et l’éloigna brusquement sans prévenir. Rochiel émit un grondement sourd mais la voix du chef du groupe l’empêcha de frapper le Linlei qui retenait Kaiji.

« Je suis navré mais les humains ne peuvent pénétrer l'enceinte sacrée. » déclara-t-il. « Vous seul pouvez nous accompagner afin de rencontrer notre seigneur. »
« Il n’est pas question que je le laisse ici !!! » s’écria violemment Rochiel, énervé.
« Vous n'avez pas le choix. » intervint leur meneur. « Si vous refusez de laisser ce garçon ici, nous ne répondrons de rien. C'est la loi. S'il reste, il ne lui sera fait aucun mal. »

Rochiel serra les poings, furieux, et tourna la tête vers son esclave quand ce dernier lui dit de ne pas s’inquiéter. Cependant son regard suppliant et angoissé lui déchira le cœur et il soupira bruyamment, avant de murmurer :

« Je ne serais pas long, promis… »

Il suivit rapidement le chef des Linlei, pressé de finir cette entrevue avec leur seigneur pour retrouver au plus vite Kaiji. Il n’avait pas aimé le regard qu’il lui avait lancé, un regard plein d’appréhension et de peur, et il détestait le laisser seul loin de lui. Dire qu’il lui avait promis de veiller sur lui et au moindre problème, ils se retrouvaient séparés…
Il lança un regard noir au chef des Linlei qui n’en tient pas compte, et accéléra le pas pour rencontrer ce soi-disant seigneur.
On l’amena jusqu’à une petite hutte apparemment plus grande que les autres et on le laissa entrer seul. Un peu surpris, Rochiel s’avança et tomba nez-à-nez avec un jeune homme de son âge à peu prés, distingué et délicat, qui lui sourit en le voyant et l’invita à s’asseoir. Il était très beau : des habits fins soulignaient sa taille et de magnifiques bijoux mettaient son visage en valeur, rehaussant la pâleur de son teint.

« On m’a dit que vous étiez un animorphe… »

Il avait une voix cajoleuse et, terriblement inquiet pour Kaiji, Rochiel se contenta d’hocher de la tête pour approuver. L’autre sourit pendant que le blond s’asseyait et il le dévora des yeux pendant quelques minutes, mettant Rochiel très mal à l’aise.

« Ecoutez, je suis désolé d’être entré sur vos terres, je vous jure que je ne recommencerai pas, mais j’ignorais que… »
« Voyons, ce n’est pas grave du tout, vous êtes tout à fait pardonné ! »

Rochiel cilla, étonné.

« Mais alors pourquoi nous avoir obligé à venir ici ? Je ne comprends pas… »
« Voyez-vous, je n’avais encore jamais vu de mes propres yeux un animorphe, et j’étais très impatient de voir ce prodige de la nature… »

Ses paroles étaient mielleuses et son ton beaucoup trop confiant : Rochiel le détesta immédiatement. Il se redressa aussitôt, sentant la colère monter en lui : il détestait qu’on le considère comme une pure attraction, et c’était précisément ce que pensait le prince à cet instant même.

« Très bien, c’est maintenant chose faite ! Laissez-nous partir ! »
« Pas question ! Je tiens à vous garder à la fête de ce soir que je donnerai en votre honneur… Vous serez notre invité principal… »

Rochiel secoua la tête, ne comprenant pas du tout où voulait en venir le prince des Linlei : on aurait dit qu’il jouait avec lui et le blond commençait sérieusement à s’inquiéter. Cependant il ne pouvait pas refuser sans passer pour un impoli.

« Bien, j’y assisterai donc en vous remerciant, mais je suis venu avec un ami et je refuse de le savoir seul enfermé quelque part… »

Le prince tiqua, apparemment énervé de ce détail et il fit un vague signe de la main.

« Très bien, vous pouvez l’amener puisque vous y tenez, mais il restera avec nos autres esclaves humains. Je ne peux pas accepter un humain à ma table ! »

Rochiel s’inclina respectueusement et sortit rapidement, même si cela semblait gêner énormément le prince Linlei. Visiblement il s’était attendu à ce que l’animorphe rester avec lui, mais Rochiel était beaucoup trop inquiet pour Kaiji pour s’en rendre compte.
Il sortit rapidement et se dirigea vers l’entrée où on les avait séparé. Il croisa le chef du groupe qui les avait amené et lui demanda où était enfermé Kaiji. L’homme le renseigna très vite et Rochiel se précipita vers l’endroit qu’il lui indiquait. A quelques mètres de là, il entendit des cris et son cœur s’emballa. Furieux et mort de peur, il courut jusqu’au cabanon d’où provenait les cris, bousculant au passage les soldats Linlei, et ouvrit violemment la porte.
Il écarquilla les yeux en voyant une masse informe au-dessus de Kaiji et son sang ne fit qu’un tour ! Il bondit, prenant aussitôt son aspect animal, et le léopard s’attaqua toutes griffes dehors à la créature monstrueuse qui s’en prenait à son esclave, frappant et mordant volontiers jusqu’à ce que l’individu abandonne et qu’il parte se terrer dans un coin de la cellule en couinant de peur et de douleur.
Le léopard se plaça entre Kaiji à terre et la masse et se mit à gronder sourdement, menaçant clairement l’individu.
Puis, comprenant qu’il ne tenterait plus rien, il se tourna vers le brun et le regarda avec inquiétude. Il s’approcha doucement de lui et lui donna un petit coup de museau pour voir si tout allait bien, sous les yeux étonnés des gardes Linlei qui avaient observé la scène. Visiblement ils n’avaient jamais vu un animorphe en action…

Kaiji supplia qu'on le laisse sortir. Mais il eut beau s'égosiller personne ne vint lui ouvrir. Il s'arrêta un instant pour reprendre son souffle et faire cesser les vertiges qui le prenaient. Il n'avait jamais supporté d'être enfermé et encore moins dans une pièce aussi exigue que celle-ci. Et le fait d'être dans le noir le paniquait encore plus. Il allait se remettre à supplier quand il sentit un souffle dans son dos qui le fit frissonner. La masse informe le prit par la taille et l'attira avec violence loin de la porte. Son cri mourut avant même d'avoir franchi ses lèvres. Il se retrouva si violemment plaqué au sol qu'il eut le souffle coupé. Un liquide au goût métallique coula dans sa bouche. Il laissa échapper un faible gémissement qui se transforma en cri désespéré lorsque la masse qui l'écrasait de tout son poids commença à la battre avec force. L'esclave leva ses bras pour se protéger des coups qui pleuvaient. Il eut l'impression que l'éternité s'écoula avant que la porte ne s'ouvre avec fracas.

Une forme souple s'élança contre la masse informe qui l'agressait. Durant un instant tout ne fut plus que grognements sourds et feulements sauvages et menaçants. Il eut l'impression de flotter quand la masse s'éloigna mais son corps resta tendu, pensant recevoir de nouveaux coups. Il sentit Rochiel lui donner un petit coup de museau. Il voulut se redresser mais ne pu émettre qu'un misérable gémissement. Il toussa un peu et le liquide à l'étrange goût cuivré coula un peu plus dans sa gorge. Il réussit néanmoins à se redresser sur un coude. La tête lui tournait.

« Me... Merci... » souffla-t-il, épuisé comme s'il avait couru un marathon.

En fournissant un peu plus d'efforts, il parvint à se mettre sur son séant. Là, il enroula ses bras autour du cou du léopard et appuya son front dans le creux de son épaule, cherchant à reprendre son souffle qui paraissait le fuir. Mais il se devait d'être fort pour Rochiel. Il ne ferait que lui causer des ennuis s'il montrait qu'il se sentait mal. Il releva la tête après avoir essuyé ce qu'il identifia comme du sang qui avait coulé de la commissure de ses lèvres. Il sourit doucement, du moins il essaya car il avait peur de grimacer de douleur, ce qui était en partie le cas.

« Ca va... C'est rien... »

Kaiji se releva lentement, masquant du mieux qu'il le pu sa douleur. Il arriva tant bien que mal à se remettre sur ses deux jambes. A cet instant il se sentait non seulement inutile à son maître mais aussi terriblement faible face lui. Il se retrouvait en danger et Rochiel accourait. Il aurait pu se sentir flatté par l'attention que le blond lui portait mais il aurait voulu lui offrir une image de lui moins pitoyable que celle qu'il lui présentait en ce moment.

A l'extérieur, il y eut du raffut et les deux hommes-chat qui montaient la garde devant la cahutte s'écartèrent. Une personne richement vêtue et d'une grande beauté apparut. Visiblement, il s'agissait d'une femme. Elle paraissait inquiète et elle s'approcha d'eux.

« Est-ce que tout va bien ? Vous n'avez rien tous les deux ? » s'enquit-elle d'une voix douce.

« Princesse ! » s'écria une voix au dehors.

La femme-chat se tourna un instant.

« Par ici Loni ! » appela-t-elle. « Je suis navrée des manières de mon frère... » s'excusa-t-elle en s'adressant de nouveau à Rochiel et Kaiji.

« Ce n'est rien... » assura ce dernier.

Apparemment, ils étaient deux à régner sur la terre des Linlei. Mais Kaiji s'en fichait un peu, tout ce qu'il voulait c'était partir loin d'ici avec son maître et continuer tranquillement leur voyage. Une autre femme-chat pénétra dans la petite cabane et toutes s'entretinrent dans leur langue. Le brun se demanda un instant ce qu'elles pouvaient bien se dire avant que sa vision ne se trouble. Il s'appuya au mur le plus proche, se sentant à bout de forces. Il se laissa glisser le long du mur, tout devenant fou autour de lui.

« Loni, il faut que tu le soignes ! » s'écria la princesse.

Il sentit un bras le retenir alors qu'il s'effondrait et il espéra secrètement qu'il s'agissait de Rochiel. Le noir fut complet durant un moment puis un vent frais lui fit ouvrir les yeux. La douleur avait disparu et il s'aperçut qu'il était étendu en dehors du cabanon. La seconde femme-chat, celle dénommée Loni, était penchée sur lui. L'esclave se redressa vivement et chercha son maître du regard. Il le vit non loin, avec la princesse qui semblait s'excuser auprès de lui.

« Vous vous sentez mieux ? » demanda Loni avec un drôle de regard.

« O... Oui, merci... »

« Vous nous avez fait peur ! Vous aviez des côtes cassées ! Alors je vous ai soigné ! » dit-elle avec un sourire satistfait.

Sans même lui laisser le temps de digérer l'information ni même de la remercier, elle se tourna en direction de la princesse et lui fit des signes accompagnés de grands cris pour lui faire comprendre que tout allait bien.

Rochiel cru que son cœur allait exploser dans sa poitrine lorsqu’il vit soudain du sang s’écouler hors de la bouche de Kaiji alors que celui-ci toussait difficilement. Il lui donna un autre petit coup de museau terriblement inquiet.
Lorsqu’il avait vu cette chose immonde penchée sur Kaiji, levant sa main pour le frapper, son sang n’avait fait qu’un tour et il s’était jeté à corps perdu dans la bataille, son esprit torturé à l’idée que Kaiji ait le moindre mal à cause de cette chose monstrueuse. Il n’avait pas été capable de réfléchir ni d’analyser correctement ce qui se passait avant que l’horrible créature ne s’éloigne enfin du jeune homme, le laissant blessé au sol. Rochiel avait senti ses pattes trembler légèrement quand il avait vu que Kaiji ne bougeait pas et l’animal en lui avait poussé un feulement plaintif et déchirant, terriblement inquiet.
Quand il vit le jeune homme se redresser sur un coude, il pu enfin respirer un peu plus calmement : il était vivant, c’était tout ce qui comptait ! Le reste pouvait attendre : les Linlei qui le regardaient bizarrement, la chose qui avait reculé et qui méritait une bonne correction pour ce qu’elle venait de faire… Rien n’avait plus d’importance et Rochiel se concentra uniquement que Kaiji, espérant qu’il n’ait rien de sérieux, même si le sang qu’il crachait prouvait le contraire.
Le jeune homme se redressa avec apparemment beaucoup d’efforts et passa ses bras autour du léopard, se serrant contre lui avec une détresse palpable qui brisa le cœur du fauve. Sur le coup, Rochiel eut envie de tout casser !!! Détruire tout ce qui avait pu provoqué cela chez Kaiji, tout ce qui lui avait fait du mal ! Il était furieux et pourtant il s’obligea à rester calme sous l’étreinte de Kaiji, l’acceptant contre lui avec attention.

« Ca va... C'est rien... »

Alors ça, Rochiel n’en croyait pas un traître mot. Il savait que le jeune homme disait cela pour le rassurer, mais le fauve n’avait aucune envie d’être rassuré !!! Comment le pourrait-on quand on voit la personne à laquelle on tient le plus cracher du sang et pratiquement grimacer de douleur ?? Il aurait voulu hurler, paniquer, frapper… Mais pas être rassuré. C’était impossible.
Il regarda avec appréhension le jeune homme se relever, constatant les bleus sur son corps et les tremblements dans ses jambes. Il arrivait à peine à tenir debout et le félin le suivit, le collant tout contre lui, prêt à intervenir au moindre signe trop évident de faiblesse.
Il tourna un instant la tête vers la chose qui avait bougé dans le fond et grogna sourdement avec colère : la créature cessa aussitôt de bouger et elle se recroquevilla sur elle-même, peureuse et effrayée.

Ce fut le bruit à l’extérieur qui attira l’attention de Rochiel et il vit une femme superbe s’approcher rapidement, apparemment inquiéte :

« Est-ce que tout va bien ? Vous n'avez rien tous les deux ? »

Se contentant d’observer celle qui se faisait appeler princesse, Rochiel l’évalua rapidement : elle semblait différente du prince qu’il avait rencontré, plus naturelle, plus sincère, plus humaine… C’est grâce à cela que son instinct animal lui fit aussitôt confiance.
Elle s’excusa pour son frère et Kaiji lui assura que tout allait bien, ce qui énerva Rochiel. Non, rien n’allait bien : on les avait accueilli comme des ennemis et on l’avait séparé de son esclave, le condamnant à rencontrer cette horrible chose qui l’avait blessé. En fait, le fauve était furieux : son cœur bouillait de rage et il lança un regard noir à la princesse qui pourtant n’avait rien fait.
Alors qu’il la toisait, il entendit soudain un bruit étrange à côté de lui et vit avec horreur Kaiji glisser le long du mur, à bout de forces.
En une seconde, Rochiel se transforma et passa un bras rapide sous le corps de Kaiji pour l’empêcher de tomber, avant de le prendre dans ses bras. Le regard désespéré et inquiet qu’il lança à son esclave évanoui toucha la princesse qui vint gentiment lui toucher le bras.

« Allons venez, ma suivante va le soigner. Elle a un don pour cela. »

Rochiel lui répondit d’un regard noir mais comme c’était sa seule solution, il soupira et emmena son précieux fardeau au-dehors. Il le déposa délicatement sur un coin d’herbe propre et la suivante accourut à ses côtés pour soigner Kaiji.
Or le regard attentif que posait Rochiel sur chacun de ses gestes comme s’il la surveillait la mit mal à l’aise et elle finit par lui demander de s’éloigner un peu.
Rochiel grogna mais la princesse vint le prendre par la main et l’éloigna rapidement avant qu’ils ne s’énervent.

« Voyons, laissez-la faire, elle est très douée… Ne vous en faites pas, je vous jure qu’elle ne lui fera aucun mal ! »

A peine rassuré, Rochiel la laissa l’entraîner un peu à l’écart et elle renouvela ses excuses pour son frère que le blond réfuta d’un geste :

« Ce n’est pas à vous de vous excuser. » gronda-t-il, toujours sur les nerfs et inquiet pour Kaiji.

Il lançait fréquemment des coups d’œil dans sa direction et la princesse sourit, attendrie de son comportement.

« Vous semblez tenir à lui… »

Rochiel écarquilla les yeux et la regarda bizarrement, apparemment dérangé par cette constatation pourtant évidente. Il préféra changer de sujet, gêné :

« Pourquoi votre frère tint-il absolument à nous garder pour le banquet de ce soir ? Pourquoi ne pouvons-nous pas partir ? »

La princesse soupira et baissa les épaules :

« Je suis désolée, mon frère est un peu… capricieux… J’espère qu’il n’a rien en tête pour ce soir. En tout cas au moindre problème, vous pouvez compter sur moi, je vous aiderais. »

Rochiel lui lança un regard méfiant et répliqua :

« Et pourquoi donc ? »
« Disons juste que je n’aime pas les manières de mon frère, c’est tout… »

Le blond comprit aussitôt que les rapports entre ces deux-là ne devaient pas être joyeux et il se maudit de devoir être pris entre deux feux. Il allait lui répliquer qu’il ne voulait pas être mêlé à tout ça quand un cri de la suivante lui indiqua que Kaiji allait mieux.
Rochiel tourna aussitôt la tête vers lui et quand il vit Kaiji assis dans l’herbe, il se précipita vers lui et sans même se rendre compte de ce qu’il faisait, il s’agenouilla et le serra contre lui avec force, sentant enfin son cœur s’apaiser.
Il ne dit pas un mot mais il ferma les yeux et soupira de soulagement, serrant fort contre lui ce petit corps auquel il tenait tant, c’était vrai…
La princesse les rejoignit en souriant.

« Si vous voulez vous reposez, vous pouvez venir chez moi. Vous êtes les bienvenus… »

Elle leur indiqua la direction et Rochiel tourna sa tête pour acquiescer, avant de passer ses bras autour du corps de Kaiji, qu’il souleva aussitôt dans ses bras, le portant contre lui. Il n’était plus question qu’il le lâche désormais !

« Je vous suis » confirma-t-il, ainsi chargé.

La princesse passa devant, suivie de sa suivante, et Rochiel les suivit à distance raisonnable tout en serrant Kaiji contre lui dans ses bras.
Profitant qu’elles ne pouvaient pas les entendre, Rochiel murmura :

« Je suis désolé de t’avoir laisser seul Kaiji… Cela ne se reproduira plus. Comment vas-tu ? »

Il lui lança un regard inquiet et ému, avant de resserrer sa prise sur le corps de son esclave alors qu’ils traversaient le village sous les yeux étonnés des Linlei. Cela devait être la première fois qu’un humain entrait sur leur territoire, mais Rochiel n’aurait plus accepté d’être séparé de Kaiji.
La princesse les mena jusqu’à une grande hutte assez imposante et les laissa entrer.

« Soyez les bienvenus chez moi. »

Elle entra à leur suite et désigna une petite pièce attenante au grand séjour, indiquant simplement :

« Il y a un lit là-bas, vous serez tranquille. »

Rochiel acquiesca et la remercia rapidement, avant de se diriger dans la petite pièce qu’elle lui avait indiqué. Il y avait effectivement un lit et Rochiel y déposa doucement Kaiji, avant de s’asseoir à côté de lui sur le lit. Il tendit sa main et vint doucement essuyer le sang qui coagulait sur une petite plaie qu'il avait sur la lèvre.
Il lui adressa un petit sourire timide et lui dit gentiment :

« Il va falloir que tu retires tes vêtements Kaiji… Il faut que je voies tes blessures… »

A peine la suivante eut-elle fait signe en direction de son maître que celui-ci se retrouvait à ses côtés. Kaiji eut l'impression de voir une véritable boule de nerfs jusqu'à ce qu'il se sente étreint. Il entendit Rochiel soupirer et pour le rassurer, il se blottit doucement contre lui. Un bruissement tout proche lui fit lever les yeux. C'était la princesse qui s'avançait vers eux avec un sourire.


« Si vous voulez vous reposez, vous pouvez venir chez moi. Vous êtes les bienvenus… »

Il avait voulu rapidement demander qui l'avait rattrapé mais il se sentit soulevé du sol. Même si son maître le tenait solidement contre lui, il noua ses bras autour de son cou, posant son front contre sa joue. Rochiel répondit qu'il la suivait et le petit groupe se mit en marche. Un signe discret lui fit tourner les yeux vers Loni, la suivante. Elle articula silencieusement quelques mots qui firent s'embraser ses joues puis elle se hâta de les dépasser pour rejoindre sa maîtresse. Rochiel sembla laisser entre eux et les deux demoiselles une certaine distance. Peut-être avait-il besoin de lui parler.

« Je suis désolé de t’avoir laisser seul Kaiji… Cela ne se reproduira plus. Comment vas-tu ? »

« Ce n'est pas de votre faute... » répondit-il sur le même ton. « Un peu comme si j'avais été piétiné par un troupeau de chevaux, mais ça va... » assura-t-il avec un petit sourire.

L'étreinte du blond se resserra autour de lui et il ne s'en lova que plus contre son porteur. Il se sentait en sécurité entre les bras de son maître et après la frayeur qu'il venait d'avoir, il n'était pas prêt de quitter ce cocon réconfortant. Ils traversaient le village des Linlei et nombre d'entre eux sortaient de leur cahuttes ou s'accoudaient aux fenêtres pour les regarder passer. Intimidé et dérangé par toutes ces paires d'yeux qui les fixaient, le brun enfouit doucement son visage contre l'épaule rassurante de Rochiel. Le trajet parut durer des heures pour finalement arriver dans hutte bien plus grande que les autres et que l'on pouvait plus aisément qualifier de maison. Après leur avoir souhaité la bienvenue, la princesse leur indiqua une pièce où personne ne viendrait les déranger. Rochiel y pénétra et déposa doucement Kaiji sur le lit qui s'y trouvait. Son maître tendit la main vers lui et essuya du sang qui séchait sur sa lèvre. L'esclave porta à son tour sa main à sa lèvre pour constater qu'il avait une petite plaie.

« Il va falloir que tu retires tes vêtements Kaiji… Il faut que je voies tes blessures… »

Le ton qu'employa Rochiel et son sourire le rassurèrent. En effet, si la première qu'il avait eu à se dévêtir face à son maître Kaiji n'avait éprouvé aucune honte, à présent il mourait d'envie de dissimuler son corps sous une multitude de vêtements. Son agression dans les toilettes du bar avait brisé son masque, ce personnage créé de toutes pièces afin de protéger ce petit garçon qu'il avait été et qu'au fond, il était encore aujourd'hui.

Il se dépêcha de déboutonner sa chemise et de retirer son pantalon qui dévoilèrent une peau laiteuse macculée de bleus et d'eccymoses en tous genres. La seule douleur qu'il ressentait pour le moment était celle de son abdomen, à l'endroit où ses côtes s'étaient brisées, sous le choc produit par le poids de la créature après que cette dernière l'ait éloigné de la porte. D'ailleurs une marque bleue commençait à se former. Sur ses cuisses s'étendaient également des marques violacées, accompagnées par de profondes lacérations: pour son plus grand malheur, la créature possédait des griffes sur ses membres postérieurs et il en avait fait les frais. Enfin, sur ses bras, en plus des bleus diagnostiqués un peu partout sur le reste de son corps s'ajoutaient de belles traces de morsures. Kaiji avait eu le loisir d'apprécier le tranchant des dents accérées de ce monstre qui s'était fait une joie de les utiliser sur ses bras minces. A un endroit, il s'était particulièrement acharné et l'on pouvait presque voir l'os apparaitre sous la chair. Si Rochiel n'était pas intervenu, il aurait certainement fini en pièces détachées. Kaiji masqua rapidement ses bras sous sa chemise dont les manches étaient en lambeaux avant de baisser les yeux.

« Je ne sens rien pour le moment mais... C'est pas très beau alors... »

Le brun se rappelait des corrections qu'il avait enduré à cause de sa génitrice. Le seul souvenir qu'elle avait gardé de son défunt mari était un sublime sabre qu'elle utilisait pour le battre lorsqu'il ne lui ramenait pas suffisament d'argent. Il se souvenait encore de la brûlure cuisante de la lame sur sa peau et dans sa chair. Pourtant à chaque fois, son corps était ressorti comme s'il n'avait jamais rien subi, sans la moindre petite cicatrice. Il avait vu aussi défiler nombre d'amants filous de sa mère avec des blessures à faire froid dans le dos. Pourtant, voir son propre corps dans un état aussi désastreux l'effrayait et lui donnait l'impression d'avoir été violé une seconde fois. Il voulait focaliser son esprit sur autre chose et allait ouvrir la bouche pour engager la conversation quand la porte s'ouvrit soudainement, livrant passage à un jeune homme bien bâti et à la peau halée par le soleil.

« Je vous apporte des vêtements propres. » dit-il avec un sourire.

Il avait l'air aussi gentil que la princesse ou Loni mais Kaiji eut une réaction d'animal blessé et terrorisé. Il se réfugia aussitôt contre Rochiel, cherchant à se dissimiler, en vain, aux yeux de ce serviteur qui n'avait pas l'air prêt à quitter la pièce. Il s'inclina poliment et sourit au blond.

« Je m'appelle Calan. La princesse ne peut malheureusement pas s'occuper de vous jusqu'à ce soir et c'est moi qu'elle a chargé afin de la remplacer. Je serai également votre guide au banquet de ce soir. Si vous avez une question ou besoin de quelque chose, n'hésitez pas. »

Calan s'inclina à nouveau et les laissa enfin seuls. Malgré le fait qu'il ait quitté la pièce, l'esclave resta lové contre Rochiel, ne désirant plus rien d'autre que de ne plus être arraché à cette étreinte. Si auparavant il se montrait impassible, son agression avait détruit le seul rempart qu'il possédait et les évènements de ces deux derniers jours faisaient ressortir sa sensibilité à fleur de peau. Il aurait souhaité pleurer. Pour la première fois de sa vie, il désirait fondre en larmes, être secoué de sanglots mais c'était comme si un grain de sable avait enrayé le mécanisme. Et rien ne vint, pas la plus petite larme ne roula sur ses joues. En parler aurait été d'une grande aide mais tout était si confus qu'il était incapable de mettre des mots sur ses émotions, lui qui n'était naturellement pas doué pour s'exprimer par la parole, lui qui n'avait pratiquement jamais connu que le langage du corps. Il enroula ses bras autour du cou de Rochiel. Il serra si fort que ses plaies qui commençaient à ne plus saigner se rouvrirent. Chacun de ses muscles était si tendu qu'il en avait mal. La seule chose qu'il réussit à émettre fut un murmure étranglé.

« Je vous en prie... Serrez-moi fort, je vous en supplie... »

L'esclave réalisait seulement maintenant qu'il avait frôlé la mort et que si le chef des Linlei avait retenu Rochiel ne serait-ce qu'une minute de plus, jamais il n'aurait été là. Serré contre son maître, il se sentait comme paralysé et jamais il n'avait autant remercié le ciel d'avoir placé le blond sur sa route. Il relâcha doucement son étreinte, son corps mis à rude épreuve n'en supportant pas plus. Il resta cependant lové contre Rochiel.

« J'ai eu si peur... » murmura-t-il d'une voix brisée.

Son coeur battait aussi vite que s'il était encore dans ce cabanon. Heureusement, la présense de son maître le rassurait et l'apaisait.

[Désolée, moi je n'ai pu faire que deux pages -_-']

Rochiel demanda doucement à Kaiji de se déshabiller, et malgré l’hésitation qu’il lut sur les traits du jeune homme, ce dernier s’exécuta et dévoila son corps marqué par l’attaque de la créature dans la prison des Linlei.
La colère qui avait précédemment habité l’esprit de Rochiel et qui s’était extériorisé en attaquant cette horrible monstre qui s’en était pris à Kaiji revint au triple galop au fur et à mesure que l’esclave dévoilait ses blessures.
Rochiel serra les poings tellement fort que ses ongles s’enfoncèrent dans ses paumes, et il serra les dents, la mâchoire contractée à l’extrême. Ses yeux étaient remplis de fureur et si quelqu’un était entré à ce moment-là, il l’aurait probablement tué sans même lui demander qui il était.
Rochiel était au bout de ce qu’il pouvait supporter : qu’on le blesse lui et qu’on le maltraite ne lui aurait pas fait plus d’effets que de voir Kaiji blessé comme il l’était. Ses cuisses étaient lacérées, ses bras saignaient à divers endroits et il avait une multitude bleus qui commençaient d’apparaître sur son corps, en particulier au niveau de son abdomen, sûrement à cause de ses côtes cassées comme l’avait précisé la suivante de la princesse.
L’animorphe observa chacune des marques avec attention, sa fureur croissant au fur et à mesure. C’était plus fort que lui : il y avait ce sourd instinct animal qui hurlait au fond de lui-même qu’il était intolérable qu’on ait touché à SON Kaiji. Et plus son instinct protecteur se réveillait, plus était bouillait de rage de voir l’état dans lequel était son esclave.
Lentement et très doucement, il passa sa main sur les cuisses pâles et marquées de Kaiji, survolant sans lui faire mal les blessures dûes aux griffures du monstre. Puis sa main partit un peu plus haut se poser sur l’abdomen fragilisé de l’esclave, et l’effleura délicatement. On aurait cru que Rochiel voulait soulager Kaiji et espérait le guérir rien qu’en le touchant. C’était impossible mais l’animorphe était trop secoué par les blessures de Kaiji pour vraiment remarqué ce qu’il faisait.
Il ne l’entendit même pas parler : son esprit était entièrement concentré sur cette rage intérieure qu’il ressentait et qui le mettait dans tous ses états.
Il sursauta brutalement quand la porte s’ouvrit et faillit se retourner pour sauter sur l’impudent qui osait les déranger, mais ce fut Kaiji qui l’empêcha de faire cette bêtise. Dans son esprit, pour l’instant, Rochiel aurait probablement tué n’importe qui qui approcherait trop prés de SON Kaiji. C’était plus fort que lui, animal…
Kaiji se blottit soudain contre lui, apparemment très mal à l’aise et effrayé, et Rochiel passa instinctivement ses bras autour de lui pour le protéger et le rassurer, sa colère un peu diminuée par le fait de voir Kaiji dans cet état psychologique. On aurait dit qu’il avait peur…

« Je m'appelle Calan. La princesse ne peut malheureusement pas s'occuper de vous jusqu'à ce soir et c'est moi qu'elle a chargé afin de la remplacer. Je serai également votre guide au banquet de ce soir. Si vous avez une question ou besoin de quelque chose, n'hésitez pas. »
« Bien… Maintenant sortez. » gronda Rochiel, menaçant, sans même tourner son visage vers Calan.

L’homme sortit et l’attention de Rochiel retourna aussitôt sur Kaiji. Ce dernier s’était lové contre lui et le blond pouvait presque sentir les tremblements qui le secouaient, ce qui l’inquiétait énormément. Le brun enroula soudain ses bras autour du cou de Rochiel et le serra comme si sa vie en dépendait. Il était tendu à l’extrême et le cœur de Rochiel fit un bond dans sa poitrine quand il comprit la détresse du jeune homme et surtout quand l’odeur du sang parvint à ses narines exacerbées.

« Je vous en prie... Serrez-moi fort, je vous en supplie... »

Rochiel ne dit rien mais obéit, resserrant sa prise sur Kaiji, l’enveloppant dans ses bras protecteurs, cherchant à créer un petit cocon de chaleur pour cet être marqué et blessé. Il se sentait terriblement coupable mais également mal à l’aise et inquiet. Si seulement il avait insisté pour rester auprés de Kaiji, rien ne serait arrivé.
Le brun le lâcha doucement, mais resta contre lui : de toute façon, Rochiel n’était pas prés de le lâcher.

« J'ai eu si peur... »

Le blond passa sa main derrière la tête de Kaiji et l’attira contre son épaule, avant d’enfouir son visage dans les cheveux de Kaiji. Il ferma les yeux et murmura, serrant très fort l’esclave contre lui :

« Moi aussi… Si tu savais Kaiji… Je m’en veux tellement. »

L’odeur du sang l’agressa de nouveau et cette fois-ci, Rochiel comprit qu’il était plus que temps d’agir. Il repoussa très doucement Kaiji et l’obligea à s’allonger sur le lit. Puis il courut jusqu’à la porte et appela Calan avec une voix si pressée que le jeune Linlei apparut aussitôt.

« Apportez-moi de l’eau propre, un baume de cicatrisation et des bandages. Et dépêchez-vous !! »

Ce ne fut pas long, et alors que Rochiel était retourné vers Kaiji, le jeune Linlei apporta ce qu’il avait demandé et le posa à côté du lit du brun avant de repartir, après avoir croisé le regard qui voulait en dire long de Rochiel.
Très délicatement, le jeune homme commença à nettoyer les plaies de Kaiji avec de l’eau et une petite serviette, puis il passa le baume cicatrisant, espérant que celui-ci soit efficace. Il était concentré sur sa tâche et relevait de temps en temps ses yeux sur Kaiji pour le rassurer d’un petit sourire avant de continuer à le soigner.
Ses doigts passaient délicatement sur la peau abîmée du jeune homme et il soupira, énervé, quand il remarqua la blessure conséquente que Kaiji avait au bras, sûrement provoquée par une morsure. Elle n’était pas belle à voir et Rochiel y passa beaucoup de temps, veillant à ne pas faire plus de mal que nécessaire au jeune homme.
Puis il banda son bras et une de ses cuisses un peu trop lacérée, avant de s’occuper de son torse qui prenait déjà une mauvaise couleur violette. Il le banda proprement puis reposa son matériel à côté du lit en soupirant.
Il jeta un regard penaud au jeune homme allongé et esquissa un sourire timide.
Sa fureur précédente était retombée : passer un peu de temps auprés de Kaiji, seul avec lui, lui faisait du bien.
Il éloigna les bandages et le baume puis s’allongea aux côtés de Kaiji sans un mot, avant de passer ses bras autour de lui et de le serrer contre lui, l’enveloppant dans son giron protecteur. Il n’aimait pas sentir cette détresse chez Kaiji, et il espérait qu’il saurait le rassurer.
Il déposa un léger baiser sur son front et lui murmura, après avoir ramené les couvertures sur eux :

« Repose-toi, tu en as besoin. Ne t’inquiètes pas, je reste prés de toi maintenant. Il ne t’arriveras plus rien Kaiji, je te le promet… »

Il soupira, heureux de sentir le brun entre ses bras, mais garda les yeux ouverts, pensif et un peu perplexe quand à ce qui leur arrivait et cet étrange peuple des Linlei. Ce banquet programmé ne lui disait rien qui vaille….
Doucement, sa main partit dans les cheveux de Kaiji et les caressa tendrement, presque instinctivement.

Le blond répondit à sa requête et le serra contre lui. Il avait aperçu la fureur qui grondait en lui et cela le désolait. Il avait déjà attiré des ennuis à son maître par trois fois: la veille de leur départ, au bar, le matin même où ils avaient quitté la demeure familiale et enfin aujourd'hui. Au fur et à mesure qu'il avait révélé les parties blessées de son corps, Rochiel avait doucement effleuré chaque endroit meurtri et cela l'avait apaisé jusqu'à ce que Calan entre. Le blond l'avait aussitôt renvoyé, peu désireux de s'entretenir avec un Linlei quel qu'il fut. A présent, à bout de forces, il ne pouvait que rester blotti contre lui. Kaiji sentit la main de Rochiel se positionner derrière sa tête tandis qu'il nichait son visage dans sa sombre chevelure.

« Moi aussi… Si tu savais Kaiji… Je m’en veux tellement. »

Rochiel s'écarta doucement de lui et le força gentiment à s'étendre sur le lit. Le brun n'émit aucune remarque et d'ailleurs, il n'était ni en état et il n'en avait encore moins la force de le faire. Les draps étaient frais sur sa peau: c'était agréable et pourtant, il frissonna légèrement, le souvenir encore trop présent de cette immonde créature rôdant dans son esprit. Rochiel avait fait appel à Calan qui s'était empressé de lui apporter ce qu'il avait demandé avant de sortir. Durant ce laps de temps, l'esclave s'était senti un peu ailleurs, comme dans un état second. Il sursauta légèrement et poussa un petit cri lorsque son maître s'appliqua à nettoyer ses plaies. Les soins de la suivante de la princesse avait certainement anesthésié son corps et maintenant qu'il retrouvait des sensations normales, la douleur affluait. Rochiel se montra doux, très tendre même quand il étala le baume sur ses plaies. Il s'efforçait même de le rassurer en lui souriant de temps à autre lorsqu'il s'interrompait dans sa tâche. Enfin, il eut l'impression de se transformer en momie tant le blond dû utiliser de bandage pour l'une de ses cuisses, son abdomen et son bras. Les soins de son maître lui étaient indispensables et agréables mais il aurait préféré rester dans ses bras, sans bouger. Mais il avait bien fallu le faire sinon, ses blessures risquaient de s'infecter. Enfin Rochiel s'installa près de lui après avoir rangé son attirail d'infirmier improvisé. Il se lova aussitôt entre ses bras, retrouvant cette chaleur qui semblait pouvoir le préserver de tout. Il ne prit même pas la peine de retenir un soupir de soulagement, appréciant à sa juste valeur le doux baiser que venait de lui offrir son maître.

« Repose-toi, tu en as besoin. Ne t’inquiètes pas, je reste prés de toi maintenant. Il ne t’arriveras plus rien Kaiji, je te le promet… »

Kaiji aurait donné tout l'or du monde pour le croire. Malheureusement, un mauvais pressentiment étreignait son coeur. Et puis il voulait s'excuser avant de s'autoriser un peu de repos. A ses yeux, celui qui en avait besoin n'était pas lui mais le blond qui, si pour le moment ne s'en plaignait pas, finirait par être agacé de devoir sans cesse le secourir. Par quatre fois déjà il s'était interposé entre lui et ceux qui lui voulaient du mal.

« Je suis désolé... Je dois vous causer du souci... Vous êtes si gentil avec moi... Mais vous allez sûrement finir par vous lasser de devoir toujours me secourir au moindre de mes faux pas... » murmura-t-il, honteux de sa propre attitude.

Lui qui avait tant espéré pouvoir continuer à vivre sous sa carapace qu'il croyait si solide, il avait tout perdu en l'espace d'un instant et les dangers de chaque instant l'empêchaient de reconstruire ne serait-ce qu'une infime partie de ce masque qu'il avait porté durant tant d'années. Il leva les yeux vers Rochiel et, profitant de la proximité de leurs deux visages, il effleura de ses lèvres celles de son maître.

« C'est juste pour vous dire... Merci... » chuchota-t-il.

Il noua ses doigts fins sur la nuque du blond, cachant son visage dans le creux de son épaule. Il hésita un instant, craignant de faire un cauchemar, mais dès qu'il eut fermé les yeux, il s'assoupit paisiblement. Les battements de son coeur se firent plus réguliers et son souffle s'apaisa. Cependant, la crainte qu'il éprouvait l'empêcha de dormir plus de trois heures et lorsqu'il s'éveilla, il eut l'impression de n'avoir eu que peu de temps de sommeil. Il se sentait éreinté et il avait légèrement froid, de par le fait qu'il soit si peu vêtu sous les draps, aussi se bouina-t-il un peu plus contre le corps délicieusement chaud de Rochiel.

« Est-ce que j'ai dormi longtemps...? » s'enquit-il d'une voix encore ensommeillée.

[J'ai essayé de faire court, j'espère que ça donne mieux ^^]

« Je suis désolé... Je dois vous causer du souci... Vous êtes si gentil avec moi... Mais vous allez sûrement finir par vous lasser de devoir toujours me secourir au moindre de mes faux pas... »

Rochiel soupira : Kaiji avait-il seulement conscience de ce qu’il disait ?
Aller le secourir n’était pas un problème pour Rochiel, le jeune homme l’aurait fait autant de fois que nécessaire. Mais c’était de savoir les blessures qui s’accumulaient sur le corps de son esclave et dans son cœur qui le mettaient hors de lui. Il ne voulait plus voir le jeune homme souffrir, cela lui devenait insupportable. Parce que quand Kaiji allait mal et bien… Et bien…
Rochiel allait mal. C’était aussi simple que cela. En quelques jours, le jeune homme avait pris une place considérable dans la vie du blond, une place de choix. Celle qu’il avait réservé à son père mais que ce dernier avait toujours refusé.
Rochiel n’avait jamais aimé personne, hormis son père mais ce dernier l’avait rejeté. Il n’avait jamais eu personne à qui se confier, ni à qui faire confiance… Personne ne l’avait regardé comme Kaiji le regardait lui… En quelques jours, Kaiji avait comblé tous ces manques affectifs dont souffrait le jeune homme et plus le temps passait, plus Rochiel s’attachait à lui. Et plus il déplorait de le voir souffrir.

Il sentit l’esclave bouger dans ses bras et se rehausser pour venir déposer gentiment ses lèvre sur les siennes dans un petit baiser.

« C'est juste pour vous dire... Merci... »

C’était loin de l’échange passionné qu’ils avaient eu la veille mais le cœur de Rochiel s’en trouva consolidé et il sourit doucement en resserrant ses bras autour de Kaiji.
Il sentit rapidement le brun sombrer dans le sommeil et le garda contre lui, heureux de le voir enfin prendre un peu de repos. Il déposa un baiser doux sur son front et veilla sur son sommeil, un peu songeur.
Lorsqu’il fut sûr que Kaiji dormait, il se pencha et murmura doucement :

« Tu n’as pas besoin de me dire merci Kaiji… C’est moi qui te dois tout… Je… Tu comptes beaucoup pour moi… »

Il espérait que cela bercerait les rêves du jeune homme. Il lui avait avoué ce qu’il n’oserait jamais dire à voix haute.

Kaiji se réveilla quelques heures plus tard et Rochiel le sentit se blottir contre lui. Il serra sa prise sur lui avec tendresse.

« Est-ce que j'ai dormi longtemps...? »
« Trois petites heures seulement… Tu t’es reposé ? » s’inquiéta le blond.

Il jeta un coup d’œil sur l’état général du brun et jugeant qu’il pouvait l’abandonner quelques instants, il l’embrassa doucement sur le front et murmura :

« Ne bouge pas, je reviens. »

Il sortit quelques minutes, le temps d’aller chercher quelque chose à grignoter et il ramena un plateau garni dans la chambre qu’il déposa devant Kaiji encore au lit. Il ne mit pas longtemps avant de le rejoindre sous les couvertures pour le réchauffer : il lui avait semblé que le jeune homme avait froid à son réveil et il le serra contre lui avant de s’exclama joyeusement :

« Le déjeuner est servi ! Mange à ta faim Kaiji, tu en as besoin… »

Et Rochiel, sans attendre, prit un petit morceau de viande entre ses doigts et vint le présenter devant les lèvres de Kaiji avec un petit sourire taquin.

« Je veux que tu reprennes des forces… Ordre de ton maître ! » dit-il sur le ton de la plaisanterie, un tendre sourire sur les lèvres.

A peine eut-il bougé que l'étreinte de son maître se reserrait sur lui. C'était si agréable.

« Trois petites heures seulement… Tu t’es reposé ? »

Kaiji hocha affirmativement la tête. Rochiel se pencha doucement sur lui et l'embrassa sur le front.

« Ne bouge pas, je reviens. »

Le blond quitta la chambre et le jeune homme en profita pour se redresser. Il attrapa un oreiller et l'entoura de ses bras, ramenant ses jambes sous lui. Rochiel revint rapidement avec un plateau plutôt chargé et il revint sous les couvertures, le serrant contre lui.

« Le déjeuner est servi ! Mange à ta faim Kaiji, tu en as besoin… »

Et sans plus attendre, son maître prit un bout de viande qu'il lui présenta avec un sourire.

« Je veux que tu reprennes des forces… Ordre de ton maître ! »

Kaiji sourit à son tour et ouvrit docilement la bouche, attrapant le morceau de viande entre ses lèvres. Même si c'était plus qu'agréable de se faire dorloter par son maître, il devait se débrouiller un peu tout seul et manger faisait partie des choses les plus faciles à faire. Il entreprit donc de manger tout ce qui passait à la portée de sa main, c'est à dire presque tout ce qui se trouvait sur le plateau. Au fur et à mesure qu'il dévorait et piochait dans les différents plats, il se rendit compte qu'il avait une faim de loup. Au final, il avala presque la moitié de ce que contenait le plateau. Après quoi, il se lova contre Rochiel en soupirant. Il se sentait déjà mieux même s'il était encore secoué par les récents évènements.

« J'ai vraiment bien mangé ! » dit-il en s'étirant doucement pour éviter d'élancer à nouveau ses blessures. « Quelle est la suite du programme, maître ? » sourit-il en reprenant la plaisanterie du blond.

Le brun avisa la pile de vêtements que Calan avait apporté un peu plutôt. Il ne s'agissait certainement pas de leurs affaires et il aurait largement préféré porter les effets que son maître lui avait gracieusement offerts plutôt que d'enfiler ceux-là. Mais il n'avait pas vraiment le choix et remettre ses habits en lambeaux n'était pas le choix le plus judicieux qui soit.

« J'aimerai... m'habiller... Est-ce que vous pouvez m'aider ? » demanda-t-il tout doucement en commençant à s'extirper des draps.

Il aurait bien voulu se vêtir seul mais c'était à exclure. Même s'il venait de se nourrir, il n'était pas sûr de pouvoir tenir sur ses deux jambes et puis les diverses plaies étiraient douloureusement sa peau et ses muscles, ce qui l'empêchait d'étendre ses bras et ses jambes comme il le souhaitait. Encore une fois, il eut l'impression d'être plus un fardeau qu'un compagnon de voyage pour le blond. S'enroulant au mieux dans un drap, Kaiji gagna lentement le bord du lit afin d'en descendre pour s'habiller convenablement et non pas comme un enfant qu'on lange.

« Je suis désolé de vous causer tous ces ennuis... »

Il se sentait misérable, certainement plus qu'à l'époque où sa mère se servait de lui. Depuis que Rochiel l'avait arraché des griffes du marchand, il ne faisait que lui attirer des problèmes et cela le désolait énormément. Il baissa les yeux et soupira tristement, se sentait parfaitement inutile à son maître.

Le brun accepta le morceau de viande que lui présentait Rochiel et le prit entre ses lèvres, léchant très légèrement les doigts du blond au passage qui tenta de dissimuler le frisson qui le parcourut en souriant doucement.
Kaiji était vraiment un bel homme, fin et délicat, avec cette petite étincelle de vie qui réconfortait Rochiel et lui donnait envie de tout faire pour la préserver. Les différents incidents qui avaient parcouru leur chemin commun et qui avaient surtout atteint Kaiji l’avaient un peu fait se replier sur lui-même, mais malgré tout, plus le temps passait et plus le blond sentait que l’esclave allait de mieux en mieux, signe que bientôt tout cela ne serait que du passé, et il s’en sentait profondément heureux. Il ne voulait pas que le sourire quitte le visage si joli de Kaiji.

Le brun mangea à sa faim, dévorant littéralement tout le plateau et Rochiel le regarda faire, un peu amusé et rassuré d’une telle faim.

« Quelle est la suite du programme, maître ? »

Rochiel releva un sourcil, se posant la même question. Il savait qu’il devait se rendre au bal donné par les Linlei le soir même, mais jusque là, ils avaient quartier libre et le blond ne savait pas vraiment quoi faire de ce temps libre. Sortir au milieu des Linlei ne lui disait rien qui vaille mais rester enfermé dans cette chambre ne leur remonterait pas plus le moral…
Et puis le jeune homme s’inquiétait pour Kaiji et son état de santé. Il n’avait pas envie de faire quoi que ce soit qui puisse rouvrir ses blessures.
Ce fut Kaiji qui trouva leur future occupation et sa voix parvint timidement au blond :

« J'aimerai... m'habiller... Est-ce que vous pouvez m'aider ? »

Kaiji se mit à bouger entre les draps et se rapprocha du bord du lit dans la ferme intention de s’habiller. Quand le blond le vit bouger, son cœur s’affola et il posa aussitôt ses mains sur ses frêles épaules pour le retenir dans son mouvement. Son regard inquiet et protecteur se posa sur son esclave et il dit doucement, essayant au maximum de convaincre le brun :

« Ne bouge pas, je vais t’aider. Il ne faudrait pas que tu rouvres tes plaies Kaiji. »

Il se leva aussitôt et s’empara des vêtements désirés, regardant rapidement ce que Calan avait apporté, choisissant ce qui irait le mieux pour Kaiji. Instinctivement, il choisit des vêtements foncés qui lui rappelaient la couleur magnifique des cheveux de Kaiji, posant les autres de côté.

« Je suis désolé de vous causer tous ces ennuis... »

Le petit soupir qui suivit cette déclaration, sans parler du ton désolé sur lequel elle avait été émise, inquiétèrent Rochiel qui se retourna pour constater l’état démoralisé de son esclave, assis sur le bord du lit, tête baissée vers le sol comme s’il était coupable.
Il soupira, prit les vêtements qu’il avait choisi et revint vers le lit. Il s’agenouilla devant Kaiji à même le sol et leva la main pour aller relever ce visage qu’il affectionnait tant, refusant de voir cette mine défaitiste. Il eut un petit sourire réconfortant pour Kaiji et déclara doucement, mais d’une voix qui n’admettait aucune contestation :

« Est-ce que je me plains ? Est-ce que j’ai émis la moindre plainte qui puisse te faire croire que tu m’ennuyes ? Kaiji, ce qui m’ennuye, c’est de voir la cruauté des gens qui nous entourent et qui n’hésitent pas à te faire mal, et de constater mon incompétence à te protéger alors que j’avais promis de te rendre heureux… Mais toi, tu n’es coupable de rien, absolument rien Kaiji, alors je ne veux plus jamais entendre ces mots dans ta bouche, tu m’as compris ? Tout ce que je veux voir sur tes lèvres, ce sont des sourires, et pas ces moues d’excuses. »

Il se rehaussa légèrement et partit déposer un petit baiser sur les lèvres de Kaiji, prenant goût à la chose, avant de passer gentiment sa main dans les cheveux soyeux de l’esclave, dans un geste qui se voulait réconfortant.
Il sourit en s’écartant et montra le pantalon qu’il avait choisi :

« Allez, je vais t’aider. Mais je ne veux plus entendre ces sottises. »

Il prit très délicatement l’une des jambes de Kaiji et, la soulevant des draps, il l’enfila doucement dans la jambe du pantalon qu’il tenait. Ses mains caressaient involontairement la peau délicate et si douce de l’esclave au passage et Rochiel frissonna imperceptiblement, troublé de ce contact.
Il se dépêcha de passer l’autre jambe dans le pantalon et se releva pour aider l’esclave à faire remonter le pantalon jusqu’à sa taille.
Ses mains s’égarèrent sur les hanches fines de Kaiji et Rochiel rougit doucement, détournant la tête pour le cacher.

« Je… Je pense que… tu pourras l’attacher tout seul.. » balbutia-t-il, gêné d’être aussi troublé par un simple contact…

Il y eut un léger froissement, annonçant le choix du blond quant à ses vêtements, puis il le vit s'agenouiller près de lui. La main douce de Rochiel l'obligea gentiment à relever la tête. Il lui souriait doucement et le brun lui rendit son sourire.

« Est-ce que je me plains ? Est-ce que j’ai émis la moindre plainte qui puisse te faire croire que tu m’ennuyes ? Kaiji, ce qui m’ennuye, c’est de voir la cruauté des gens qui nous entourent et qui n’hésitent pas à te faire mal, et de constater mon incompétence à te protéger alors que j’avais promis de te rendre heureux… Mais toi, tu n’es coupable de rien, absolument rien Kaiji, alors je ne veux plus jamais entendre ces mots dans ta bouche, tu m’as compris ? Tout ce que je veux voir sur tes lèvres, ce sont des sourires, et pas ces moues d’excuses. »

Kaiji aurait donné n'importe quoi pour montrer à son maître que ses mots le touchaient profondément et que jamais il ne pourrait le remercier comme il se devait de le faire. Aussi se contenta-t-il de sourire un peu plus et de refouler les larmes -de joie cette fois- qui menaçaient. Ce fut sans appréhension aucune qu'il ferma les yeux, offrant ses lèvres au baiser de Rochiel, un peu déçu qu'il ne s'y attarde pas plus longtemps. Après avoir passé sa main dans ses cheveux, il finit par se redresser.

« Allez, je vais t’aider. Mais je ne veux plus entendre ces sottises. »

Kaiji hocha doucement la tête pour approuver, se jurant intérieurement de sourire le plus souvent possible et surtout le plus sincèrement pour que le blond soit heureux. Il savait qu'il n'arrivait certainement jamais à le protéger comme il l'aurait voulu alors s'il pouvait au moins faire ça, c'était déjà un petit pas vers le bonheur qu'il souhaitait à son maître. Peut-être qu'avec un peu de chance, il ferait partie du charmant tableau du bonheur, aux côtés de son maître. Il se laissa docilement faire lorsque le blond lui prit sa jambe pour lui faire enfiler son pantalon. Ses doigts sur sa peau le firent frémir d'une étrange façon et quelque part, il se sentit frustré de la hâte que montra Rochiel à lui faire enfiler la seconde jambe de son pantalon. Lorsqu'il l'aida à se mettre debout afin d'en terminer avec le pantalon, l'esclave s'aggripa légèrement à ses épaules pour ne pas perdre l'équilibre et il sentit les mains de son maître se perdre sur ses hanches avant de détourner les yeux.

« Je… Je pense que… tu pourras l’attacher tout seul.. »

C'était étrange que le blond se montre si gêné. C'était le contraire habituellement. Il hocha doucement la tête et se débrouilla seul pour cette tâche plus que simple. Comme mu par un instinct qu'il ne se connaissait pas, un comme cet instant passé auprès du feu la veille, il se lova contre le torse de Rochiel, ses doigts fins s'égarant dans les mèches blondes qui ourlaient la nuque de ce dernier. L'espace d'un instant, l'idée qu'il y avait quelque chose dans la nourriture lui traversa l'esprit puis s'évapora comme neige au soleil.

« Est-ce que vous... m'aiderez pour le reste... ? » murmura-t-il à son oreille.

Le brun leva alors la tête et approcha lentement son visage de celui de son maître. Son coeur était prêt à lui défoncer les côtes tant il battait fort mais il ne s'en préoccupait guère. Il n'était pas vraiment sûr de ce qu'il faisait mais il savait une chose: il en avait envie. Et soudain, il se mit à prier pour que les paroles que Rochiel avait dites n'étaient pas des mots en l'air.
*« Je n’ai jamais reçu d’amour, même dans ma famille, mais je saurai t’en donner, je te le promet… Juste à toi… Juste pour que tu continues de sourire… »*

Fort de ce souvenir, il ferma les yeux, se hissa sur la pointe des pieds et pressa avec douceur et timidité ses lèvres sur celles du blond, espérant du plus profond de son coeur qu'il ne serait pas repoussé comme il l'avait si souvent été par sa mère avant qu'il ne se mette à la haïr pour de bon. Il entrouvrit doucement ses lippes et pour ajouter au fait qu'il ne se forçait aucunement, sa langue vint quémander gauchement l'entrée de la bouche de son maître. Peut-être était-ce aussi ce court baiser que lui avait donné ce dernier qui l'avait mis dans tous ses états. Il ignorait le pourquoi du comment mais toujours étail-il que pour l'heure, il se retrouvait à embrasser Rochiel au lieu de s'habiller comme le prévoyait l'idée de base...

Kaiji passa ses bras autour du cou de Rochiel et ce simple geste troubla davantage le blond qui soupira imperceptiblement. Il adorait sentir le brun contre lui : sa peau douce, sa gentillesse, ses gestes d’une douceur incroyable… Kaiji ne criait jamais et ne lui en voulait jamais, pour quoi que ce soit.
Pour Rochiel qui n’avait connu que mépris et violence, même dans sa famille, et surtout dans sa famille, Kaiji était à lui tout seul un petit miracle. Le blond n’avait jamais imaginé qu’on puisse être aussi gentil.
Oh, il avait bien vu des mères câlinant leurs enfants dans la rue, ou des pères sourire à leurs gamins enthousiastes, mais il avait cru que cela ne lui était pas destiné tout simplement. Il n’y avait pas droit et devrait vivre sans.
Mais depuis que Kaiji était avec lui, il avait reçu de sa part beaucoup plus d’affection que dans le seul sourire qu’il ait jamais reçu de son propre père, et plus le temps passait, plus il devenait accroc à cette gentillesse, plus il en redemandait.

Il savait que Kaiji lui appartenait déjà par son statut d’esclave, mais quelque part, il voulait plus. Que le brun ne regarde plus que lui et qu’il ne pense qu’à lui. C’était un sentiment violent parfois, qui le faisait quelquefois souffrir et Rochiel se trouvait injuste, se dégoûtait de pouvoir penser que Kaiji lui appartenait.
Et pourtant…
Quand Kaiji lui souriait de cette manière, il oubliait toute morale…

« Est-ce que vous... m'aiderez pour le reste... ? »

Le blond frémit et passa ses bras autour de la taille fine du jeune homme, le serrant contre lui avec une pointe de possessivité.

« Bien sûr… »

Il n’aurait jamais abandonné Kaiji. Il l’avait fait deux fois et à chaque fois cela s’était soldé par une catastrophe dont le brun avait pâtit. Plus question maintenant de le laisser seul une minute !

L’esclave lui lança un regard étrange en relevant la tête et le blond se sentit devenir tout chose, alors que Kaiji se dressait sur la pointe des pieds pour venir l’embrasser.
D’abord timide, le baiser s’enhardit et une petite langue un peu maladroite vint réclamer l’entrée de ses lèvres que Rochiel accorda de bon gré, son cœur tambourinant avec force dans sa poitrine.
Sa main droit remonta et vint se perdre dans les cheveux du brun, appuyant doucement pour approfondir leur baiser, et quand ils se séparèrent, à bout de souffle, Rochiel poussa doucement le visage de Kaiji contre sa poitrine et le serra doucement contre lui.
Le brun devait entendre son cœur battre la chamade mais Rochiel s’en moquait : il était heureux… Quelque part au fond de lui, le mince espoir d’être à son tour aimé, de connaître à son tour ce sentiment si doux, se réveilla, lui qui s’était éteint depuis si longtemps en lui.

Il resta quelques instants comme ça puis finalement il se pencha et passa sa main sous les jambes de Kaiji pour le soulever et le reposer sur le lit très délicatement, déposant l’esclave comme s’il était en porcelaine.
Il attrapa d’un geste vif la chemise en coton et la passa sur les épaules frêles de Kaiji avant de boutonner avec attention le tissu fin. Puis il releva un visage radieux sur son jeune esclave, follement heureux de ce qui venait de se passer, avant qu’une ombre légèrement inquiéte ne passe sur son visage :

« Tu crois pouvoir tenir tout un repas entier ? Parce que le prince nous a invité à manger à sa table ce soir, et je doute qu’il apprécie de ne pas nous voir à la place des invités… Même si tour cela ne m’enchante guère, je serais vraiment… heureux si tu venais avec moi… »

Rochiel adressa un petit sourire timide à Kaiji et leva sa main pour caresser délicatement la joue veloutée du brun.

Le baiser s’approfondit un peu puis une fois rompu, Rochiel l’invita à se blottir contre sa poitrine. Contre son oreille, Kaiji sentit le tambourinement désordonné du cœur de son maître. Apparemment, cela ne le laissait pas indifférent et il apprécia ce constat. Il se passa un moment avant que l’un d’eux ne bouge. Le brun se sentait si bien dans ce giron protecteur et affectueux. Puis il sentit le blond se pencher et le soulever tout en douceur pour le porter jusqu’au lit. Il le posa sur la couche comme s’il était de verre et se hâta de mettre sur ses épaules la chemise en coton qui complétait sa tenue. L’esclave articula un faible « merci » accompagné d’un sourire. Son maître lui souriait également, ce qui fit doucement gonfler son cœur.

Pourtant une ombre passa sur le visage de Rochiel qui fronça légèrement les sourcils. Kaiji redoutait un peu la suite des évènements.

« Tu crois pouvoir tenir tout un repas entier ? Parce que le prince nous a invité à manger à sa table ce soir, et je doute qu’il apprécie de ne pas nous voir à la place des invités… Même si tour cela ne m’enchante guère, je serais vraiment… heureux si tu venais avec moi… »

Le brun soupira intérieurement. Ce n’était que cela ! Il avait craint tellement pire qu’une simple invitation. Il sourit doucement et hocha la tête.

« Où vous irez, j’irai. » répondit-il simplement.

Mais sa condition d’esclave se rappela à lui brusquement. Sa mine se renfrogna un peu et il se mit à triturer un peu l’une de ses mèches sombres. Si son maître était un homme des plus tolérants, des plus bons et des plus doux, il n’en allait pas de même avec les autres. Il savait très bien qu’un esclave ne serait jamais le bienvenu à la table d’un grand maître, et encore si ce dernier portait le titre de prince.

« Je… Je ne suis pas certain que le prince accepte ma présence à sa table. Je ne suis qu’un esclave après tout… »

Le silence revint dans la pièce et l’esclave détourna la tête, comme pour cacher aux autres qu’il était juste un bien et pas une personne. Il n’aimait pas sa condition même si le blond se montrait attentionné, affectueux et sincère à son égard. Il aurait voulu être libre, mais ce n’était et ne serait jamais le cas. Il pouvait se rebeller autant de fois qu’il le voulait, rien ne changerait. Et pourtant il espérait. Il espérait avec la force d’un innocent condamné à mort qui ne souhaitait qu’une chose : que l’on aperçoive qu’il y avait erreur et qu’on ne lui prenne pas la vie. Et puis les mots de Rochiel lui revinrent à l’esprit.

« Pardon, je dis des bêtises, ne faites pas attention… » dit-il avec un sourire d’excuse.

Pourtant, au fond de lui, son cœur se serrait douloureusement. Comme Kaiji espérait. Même si jusque là tous ses espoirs s’étaient révélés vains, il voulait garder celui-là. Parce que c’était cet espoir qui l’avait gardé en vie. Même si à présent, une autre lueur d’espoir venait s’ajouter à celle-ci. Il soupira intérieurement et sourit plus franchement à son maître, comme pour se faire pardonner d’avoir oublié qu’il n’avait qu’une seule tâche pour le rendre heureux : sourire…